moments de vie

Publié le 21 Août 2022

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Mais quand donc cet abruti là-haut cessera t-il de lever son doigt ? Je n’en peux plus de ses surenchères. Se prend pour Crésus ou quoi ?

Egrotant depuis turelure je ne mérite pas de terminer ma carrière ainsi, je vous le dis !

Comment ? Je suis payé à la commission ? Plus le montant de la vente est élevé, plus je remplis mon escarcelle ?

Alors, là, c’est mal me connaître, je ne suis pas vénal pour un sou, ni pour un Euro, un Dollar, un Yen, etc…

Moi ce que j’aime dans ce métier, et qui me met en joie chaque jour que Dieu fait, c’est de taper le marteau sur le pupitre en clamant un « adjugé » bien sonore.

L’extase !

Alors, l’abruti, il l’écrase son adversaire, oui ou non ?

- Ad-ju-gé !

Ouf ! Enfin mon marteau est tout en joie.

Passons presto à l’enchère suivante.

 

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Sujet 009 de Mil et une - suite - clic

La création d'Adam de Michel -Ange - clic

 

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Publié le 10 Juillet 2022

Image Mil 

 

Ma Francinette, je l’adore !

On se comprend d’un regard. Regard qui parfois en dit long.

Ce ne fut pas toujours le cas, je l’avoue bien humblement. Pensez, une vie commune de près de quarante ans ce n’est pas tous les jours une sinécure.

Il y eut la période rouge (oui, il faut s’y faire, j’aime mettre de la couleur dans mon quotidien), rouge comme ma bagnole un peu sport, du moins je tentais de m’en persuader. J’avais 25 ans et aux dires de ma Francinette chérie la pédale de gaz était sollicitée plus que de raison.

- Armand, voyons, lève le pied, tu vas encore te choper une contravention carabinée et tu sais que notre budget est serré.

Carabinée ? Ha, ha, elle me faisait marrer avec cette expression d’un autre temps. Je rigolais moins quand il me fallait ouvrir le portefeuille face à un gendarme peu accommodant…

Du rouge, je suis passé au grenat. Pas de grande nuance me direz-vous et pourtant ce période grenat a laissé des traces, je suis devenu un expert en vins grâce à mon job de représentant commercial d’une grande appellation dont je tairais le nom.

La semaine terminée, je ne pouvais m’empêcher de savourer l’un ou l’autre cru au grand dam de ma Francinette chérie.

- Tu lèves le coude plus que de raison, Armand, ce n’est pas sérieux, répétait-elle.

Le grenat me plaisait énormément, pourtant vint un matin où je fus las de parcourir le pays en tous sens et je cherchais un autre boulot.

Période jaune comme, hum, passons…

Ce travail me dévorait, volait ma jeunesse, je n’avais plus le temps de voir ma vie s’écouler tellement je consacrais du temps à faire du chiffre d’affaires. Je ne voyais quasi plus Francine (oui, à l’époque jaune, ce n’était plus ma Francinette chérie) et parfois quand une journée de travail interminable s’achevait enfin, je n’avais pas le cœur de rejoindre notre foyer. Jaune ! Trompée, elle l’était ma pauvre compagne et je n’en suis pas fier.

- Je t’en supplie, Armand, lève le pied, ce boulot te dévore, nous dévore. A quoi bon continuer à vivre ensemble si l’on ne se voit plus ?

Un évènement inattendu changea alors notre triste destin. Un matin, alors que l’aube pointait à l’horizon et que j’étais déjà sur le départ pour rejoindre mon bureau je découvris un chiot tremblant de froid ou de désarroi devant la porte du garage. Moi qui avais toujours rêvé d’un chien je n’y fus pas insensible et je l’embarquais dans la voiture recouvert d’un plaid. Il jappait de bonheur et je n’étais pas loin d’en faire pareil.

Francine à son tour fit ravie de cette compagnie au pelage soyeux. Elle ne cessait de le caresser, de le cajoler et enfin, ensemble, nous trouvions le temps de faire, en compagnie de Noisette, de longues promenades dans les bois.

Fini le jaune funeste, la période noisette avait commencé et elle perdure encore à l’heure qu’il est.

Ma Francinette chérie, fine mouche, m’avait suggéré de postuler pour un emploi au plein air où Noisette pourrait m’accompagner. Je ne me fis pas prier et c’est avec bonheur que je suis devenu garde – homme à tout faire dans un domaine privé où j’ai coulé des jours heureux.

Noisette a vécu une belle vie à nos côtés. D’autres chiens lui ont succédé mais la période noisette est toujours de mise à l’heure où sonne ma retraite.

Ma Francinette, je l’adore ! On se comprend d’un regard… ou d’un geste. Il me suffit de lever le pied et elle devine que je veux prendre du bon temps et me reposer un peu.

Pourvu que cette période noisette se prolonge encore et encore !

Et vous, avez-vous également une période de prédilection ?

 

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Sujet 006 de Mil et une - suite : clic

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Publié le 26 Juin 2022

 

  Comme vous passez par ici et moi par-là, j’en profite pour vous faire une confidence : je déménage !

  Oui, vous avez bien entendu, je dé-mé-na-ge.

  Hélas, déménager laisse la porte ouverte à tous les cancans…

  Les entendez-vous ?

- Fais semblant de rien, elle déménage.

- Elle a mis son gros pull en laine alors que nous suffoquons avec ces 32 ° au thermomètre… elle déménage.

- Ce matin, à la boulangerie, elle a commandé deux tartes tatin pour la venue de sa grand-mère Mary décédée il y a plus de vingt ans. Vous vous rendez-compte, elle déménage ! Les tartes ? Oh, je l’aiderai volontiers à en venir à bout.

- Non, mais regardez-la, elle a enfilé une chaussure brune à un pied et une rouge à l’autre. C’est triste mais il faut bien l’avouer, elle déménage…

- Ah, vous l’avez vue se promener la nuit en chantant à tue-tête ? Du Frank Sinatra ? Avec son vieux parapluie ouvert sous la pleine lune ? Triste, mais que voulez-vous elle déménage.

- Elle perd ses clés, son portefeuilles, ne sait plus le jour, ni l’heure ? Normal, elle déménage !

- Etc, etc…

Comme nos chemins se sont croisés par hasard, je vous fais pleine confiance et vous avoue en toute confidence que j’hésite de plus en plus à franchir le pas.

  Quel pas ? Mais celui de déménager réellement voyons !

  Comprenez, ce bruit qui court anime tout le quartier qui serait bien morne sinon.

  Ah ! Vous compatissez ?

  Cela me fait un bien fou d’être enfin comprise par plus excentrique que moi !

  Mais entrez donc, il y a de la place dans ma tête et nous ne serons pas trop de deux pour divaguer !

 

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Sujet 004 de Mil et une - suite  (clic)

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Publié le 15 Mars 2022

 

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- Elle est jolie ta fleur !

- C’est une rose.

- Pourquoi il y a des mots écrits dessus ?

- Ce sont de notes de musique… tiens, je te l’offre cette rose. Veux-tu que je t’apprenne comment en créer une à ton tour ?

Je regarde Maman, elle me fait « oui, tu peux » en balançant la tête.

- Prends mon cahier de partition, là, que j’en retire deux feuilles.

J’ai tout fait comme la vieille dame me l’expliquait et même si ma fleur semble déjà un peu fanée je me sens pareil à un magicien.

- C’est pour toi, Maman ! Je lui dépose en main la rose de la vieille dame et conserve celle que j'ai créée.

Maman sourit et se met à chanter. Sa voix est tellement belle que les gens se taisent autour de nous pour l’écouter. Moi, j’ai un peu faim et je suis fatigué mais Papa me propose de jouer aux cartes avec lui et mon grand frère.

Ici, dans les caves de l’immeuble on n’entend rien. Ou alors pas grand-chose de ce qui se passe à l'extérieur pourtant je sens que Papa frisonne par moments quand le bruit des cloches et des sirènes nous parvient malgré tout.

J’ai dormi, je crois, mais ma rose magicienne est toujours bien serrée dans ma main. Papa me porte dans ses bras, je suis bien.

Non, je ne suis pas bien, j’ai peur et je dois faire pipi mais Papa me souffle « pas maintenant »

Je glisse la rose magicienne dans le col de son pull en laine. Il ne dit rien mais me serre un peu plus contre lui.

Mon frère tire une valise. Maman deux autres. Où est celle de Papa ?

La gare est bondée, je me sens tout petit, petit.

Je pleure. Mon frère pleure. Maman, avec la rose de la vieille dame accrochée à sa veste, pleure collée contre la vitre du train et envoie un baiser à Papa en larmes sur le quai. Dans sa main, la rose magicienne semble me faire un clin d’oeil.

La foule le bouscule, prend sa place près du wagon et notre père disparait de notre vue brouillée tandis que le train se met lentement en branle vers…

Je ne sais pas où !

Quand serons-nous encore réunis tous ensemble, avec en plus ce bébé qui gonfle le ventre de Maman ?

J’ai appris à confectionner une fleur en papier… peut-être qu’à mon tour j’apprendrai ce tour de magie à mon petit frère ou ma petite sœur ?

Je me love contre mon frère…

La guerre, c'est pas gai !

 

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Pour Mil et une - sujet 11/2022 - clic et clic

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Publié le 13 Février 2022

aquarelle de Chinou - clic

 

Aïe, la prochaine fois je regarderai où je mets les pieds !

Pourquoi me suis-je embarqué dans cette expédition de l’impossible ? Trop regardé Ko Lanta ? Ou Fort Boyard ?

Poissons enveloppés dans de larges feuilles et rôtis à même la braise d’un foyer improvisé entre quelques galets, vers de plage émergeant du sable blond et dégustés gigotant encore, abats douteux, tout cela m’aurait-il fait rêver à mon insu ?

Top chef ?

Oui, voilà le vrai nœud du problème…

Mes copains me lancent souvent pour se moquer de moi « T’es trop nul, mec ! Comment tu peux passer tes soirées devant la télé ? »

 

Aïe, la prochaine fois je regarderai où je mets les pieds !

J’ai dressé une liste de courses, il faut que je me grouille si je veux être prêt à l’heure prévue. A la maison c’est sacré : 19 heures, pas une minute avant, pas une minute après.

Et si j’improvisais une petite chute sur ce verglas, histoire d’avoir le coccyx en feu et l’impossibilité de me tenir debout durant quelques heures ou mieux quelques jours ?

Et zou, patatras, aïe, aïe, aïe… et zut, ce n’était pas prévu, je ne sais réellement plus me relever !

De quoi j’ai l’air les quatre fers en l’air entouré de passants qui tentent de me secourir.

- Allons debout, jeune homme, dit l’un.

- N’y touchez pas, gronde un autre, la colonne peut être touchée.

- J’appelle les secours, s’affaire une dame.

Et moi, je vois des étincelles devant les yeux. Je ne vais pas défaillir quand même ? Rhaaaa ! La honte !

 

Aïe, la prochaine fois je regarderai où je mets les pieds !

Et ne me vanterai plus jamais de savoir cuisiner ni ne répondrai au défi lancé par ma mère de préparer le dîner du jour.

Promis, juré, jamais plus je ne regarderai la télé ni ne mettrai les pieds dans la cuisine…

 

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Pour Mil et une sujet 07/2022 - clic et clic

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Publié le 6 Février 2022

 

 

Les caisses que Nora descend du grenier par le petit escalier escamotable s’empilent peu à peu dans le hall.

L’inspecteur Harry soupire. Il lui faut bien s’avouer que sans l’aide de sa collègue la tâche aurait été trop ardue pour son dos aux vertèbres un brin malmenées par le temps.  

Où sont passées mes plus belles années ? Au fond de ce fatras de carton ? L’inspecteur Harry, les bras ballants, semble transformé en statue.

Nora fredonne.

Nora fredonne quelle que soit la météo, l’humeur de son bientôt ex-supérieur ou de son compagnon.

Elle fredonne tout en jetant un regard interrogateur à son boss.

Que se passe-t-il dans la tête d’une personne quittant l’endroit où elle a vécu un grand nombre d’années ? Et tout ce petit univers empaqueté à quoi ça sert ?

La jeune femme est adepte du minimalisme et a des difficultés à comprendre les accumulations qu’elle juge compulsives.

L’inspecteur Harry soupire une fois de plus. Il s’est tellement réjoui de ce départ à la retraite, de cette vie pleine de promesses passée au soleil, libre, libre enfin de tout horaire, enquêtes ou autres obligations… et là, il se sent vide de tous ses repères.

Puis son œil frétille, il vient de repérer une caisse au carton orangé orné d’étranges fleurs. Déjà, il en sort sa vieille compagne, une machine à écrire sauvée du tout à l’informatique.

- Une antiquité bonne pour le marché aux puces, s’exclame Nora.

Harry fronce les sourcils qu’il a touffus. Comment faire comprendre à sa jeune collègue les liens qu’il a entretenus avec ce clavier ?

- Gmrr…

- Vous dites ?

- Je dis que si cette machine à écrire pouvait parler elle vous décrirait tous les suspects que j’ai eu l’occasion d’interroger.

- Bof, je connais la ritournelle, je l’entends tous les jours…

Oui, elle a sans doute raison, pense l’inspecteur Harry, les années passent mais les humains restent d’immuables suspects et les criminels se cachent souvent sous des dehors courtois ou angéliques.

Nora toujours afférée redescend la dernière caisse et se saisit de l’aspirateur qu’elle passe là-haut en un temps record.

Déjà 17 heures, il est temps pour elle de rentrer au bercail.

Harry la regarde partir, penaud, son billet à la main.

- Si on ne peut plus s’entraider où va-t-on ? a rigolé Nora en le voyant fouiller dans son portefeuilles. A lundi, pour le pot de départ ! J’avoue, chef, vous allez me manquer !

Penaud, oui, l’inspecteur l’est d’autant plus que jamais il ne lui avouera avoir jadis arrêté ses grands-parents, de fameux escrocs au quant-à-soi plus que trompeur.

Bon, c’est décidé, cette machine à écrire et la plupart des autres contenus des caisses finiront aux encombrants et peut-être, comme lui, Harry, connaîtront une autre vie !

Et vive le soleil pour encore de longues et belles années !

 

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Pour Mil et une - clic et clic

image : James Cokk - clic et clic

 

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Publié le 20 Novembre 2021

 

 

Il tricote le fil du temps
Un jour à l’endroit
Un jour à l’envers
Un autre en attente
Et glisse la maille
 
 Il tricote le fil du temps
Croise diminue augmente
Jetés points mousse ou points
Escargot garnissent les rangs
Et ajoute la maille
 
 Il tricote le fil du temps
Mais s’offre en dentelle
A dix heures à quatre
Ou à vingt c’est selon
De monter celui des mots
 
 Il tricote le fil du temps
Savoure celui des vocables
Partages échanges
Un mot à l’endroit
Un mot à l’envers
Et passe passe le temps  
 
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Mil et une - sujet 36/2021 - clic      

IvanoTivali (image G.Manucci ) - clic 

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Publié le 13 Juin 2021

Igor Morski - clic

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Allez, viens je t’emmène !

Où ?

Peu importe ! Ayons confiance, la Terre est ronde on ne peut s’y perdre.

Arrêtons de pédaler à vide, de nous défoncer comme des forcenés dans l’air malsain d’une de ces salles de torture qui fleurissent à chaque coin de rue.

La rue, justement, traversons la et laissons derrière nous nos fantômes, ceux qui nous hantent jour et nuit, inlassablement. Cessons de pleuvoir des larmes intérieures, cessons de nous noyer dans notre propre eau.

Apprivoisons-nous, laissons tomber nos carcans, ils nous corsettent à ne plus savoir respirer librement. Allégeons-nous de ces lourdes couches de culpabilité, de regrets malsains.

Non, il n’est pas trop tard mais nous ne sommes rien l’un sans l’autre, toi, mon alter ego et moi, ton second toi.

Toi, le corps, moi, l’esprit, nous formons un duo à l'entente parfois chaotique mais rien n’est grave si ce n’est perdre espoir !

Marchons avec la vie, avec notre vie, unique et éphémère…

Ici dans un parc, là-bas dans un chemin creux ; sur le petit balcon ou dans le couloir, cheminons !

Mais non, nous ne sommes pas vieux !

Regarde, l’enfance sommeille toujours en nous.

Allez, viens je t’emmène vers l’horizon bleu de ses rêves…

 

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Alter Ego - Jean-louis Aubert - clic

Pas d'ami comme toi - Stephan Eicher - clic

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Publié le 10 Juin 2021

 

La Lune là-haut si haut qu’elle ne craint de tomber
La Lune s’allume luciole dans la nuit
Croissant décroissant ou toute ronde
Cycle féminin à l’infini


Ici-bas les marées monotones
Flux et reflux incessants
Rythment le ballet des sorcières
Au coin du bois guette le loup-garou

 

Lune nouvelle noirceur sur la Terre
Quartier C ou quartier D
Éclipse la belle a rendez-vous

Et de partout les regards se lèvent voyeurs


Vite vite son bel amant la dévore

Elle se voulait princesse puissante

Mais se pressent ombre fluctuante

Déjà elle n’est plus que fadeur

 

Mais aujourd’hui la Lune est pleine
Et on ne sait pas
Qui l’a mise dans cet état
 *  
(* Alphonse Allais)
 

Sourire crayon jaune à la main
Petit Pierre a terminé son dessin

 

 

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Pour Mil et une sujet 17/2021 - clic

L’éclipse, gare Saint-Lazare, Paris, 8 avril 1921 - clic

Images de l'éclipse de ce jour, 10 juin 2021 - clic

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Publié le 18 Mai 2021

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- Et toi, Pascal, m’aimes-tu VRAIMENT ?

- Qu’est-ce qu’aimer ? On peut aimer un petit carré de chocolat…

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- Tu vois, Francine, Marcel n’a jamais rien eu à me dire, même pas qu’il m’aimait et pourtant il me l’a prouvé tant de fois.

- Tu as eu de la chance, Sylvie, pas comme moi. Eric, lui, hurlait qu’il m’aimait tout en m'administrant une volée de coups pour soi-disant me le prouver, sniff !

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- Damien, j’ai une folle envie d’assister à ce spectacle. On réserve des places ?

- Encore une histoire de bonnes femmes ! Et que je t’asperge d’eau de rose et que je t’illusionne sur l’amour et que je te concocte une soupe aux mamours éternels, ha, ha !

- Ce que tu es cynique, Damien !

- Mais va voir ce spectacle avec une amie, cela ne me dérange pas.

- Ouais, ainsi tu seras seul maître de la télécommande pour suivre un de tes indispensables matchs de rugby ou pour retrouver tes potes à la salle de musculation.

- C’est ça l’amour, ma chérie, il faut savoir garder ses distances pour le préserver et mieux se retrouver.

- Pfff ! Ronflant au plus profond du divan. Hum, vraiment pas sexy !

- Oui, parlons-en, tu n’as jamais porté la guêpière que je t’ai offerte…

- (tu parles d'un cadeau personnalisé !)

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- A qui est destiné ce message ?

- A toi, à moi, à nous ?

- Je ne me sens pas visée.

- Holà ! Moi non plus !

- Et vive notre sacro-sainte liberté, ma chère !

---

- Tu sais, Maman, j’aimerais tellement recevoir de Papa un message comme celui inscrit sur cette vitrine.

- Combien de fois faudra-t-il te répéter que ton géniteur est anonyme. Je t’ai faite seule, Wendy, toute seule ! Ne sommes-nous pas bien à nous deux ?

- Si tu le dis…

---

- (Si déjà une seule personne au monde déclarait m’aimer, je verrais cela comme un miracle. Pourquoi me suis-je assise sur ce banc ? Elle me refile le cafard cette vitrine. Stop, les larmes ! Stop, j’ai dit !)

- (Comme cette femme semble loin dans ses pensées. Tristes, gaies, va savoir mon vieux. Peut-être attend-elle quelqu’un ? Et si j’osais l’approcher, tenter ma chance en l’abordant. Trop nul, je suis trop nul ! Pourquoi suis-je si timide ? …mais, elle pleure. J’ose, j’ose pas ?)

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- Demain, 8 heures, Antoine, le laveur de vitres, sera à l'oeuvre. J’en ai assez de cette phrase que nous lisons à l'envers depuis un mois. Je compte sur vous pour en dégoter une autre, mes amis. Non, je n’ai pas de thème précis pour le futur micro-trottoir…

 

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Image Mil et une - sujet 14/2021 - clic

Jean Ferrat : Aimer à perdre la raison - clic

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Publié le 8 Mai 2021

 

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Parfois c’est un cri d’oiseau, jacassements de pie, chant d’amour printanier d’une grive, ou le glapissement de son discret voisin, le renard, sorti de son antre un peu plus haut sur la colline, parfois un moteur d’avion en phase d’atterrissage ou simplement son compagnon se retournant dans le lit à ses côtés qui la réveillent. Parfois aussi, elle doit bien se l’avouer elle ne dort pas mais maintient ses yeux fermement clos.

Angoisse. Et si…

Elle ouvre alors son troisième œil, celui qu’elle seule perçoit concrètement au milieu de son front. D’abord, elle regarde en elle et se voit bien là, chez elle, entre le jour et la nuit.

Lune ou soleil ?

Soleil ! Elle veut y croire !

Se forcer à ouvrir l’œil gauche, l’œil droit, apercevoir l’heure affichée sur le réveille-matin ou les premières lueurs de l’aube sont des victoires.

Pour combien de temps encore ?

Dans son sang coule un produit dont l’amertume est sensée faire reculer une échéance qu’elle redoute, si ce n’est la guérir définitivement de cette maladie qui peut la priver de la vue.

Le troisième œil l’aidera quoi qu’il arrive, elle en est persuadée il sera son allié.

Tout à l’heure, ou demain, elle se décidera à le représenter dans un dessin.

Qui comprendra sa symbolique ?

 

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Christian Schloe - clic et clic

Pour Mil et une : sujet 12/2021 - clic

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Publié le 14 Février 2021

 

Image Paul Morse - clic et clic 

Quel supplice ! Mais quel supplice !
Foi de  Zébulon, je ne pensais pas tomber aussi bas !
Moi, chat de concours aux nombreuses médailles, me voir dans une situation aussi ridicule cela me donne la nausée. Mais quel infâme mou ont-ils mangé ces vieux barbus pour puer autant de la gueule ?
Et que je te lèche et que je te relèche. Sont payés au coup de langue râpeuse ou quoi ?
Mais pourquoi Annabelle, ma douce, m’a-t-elle embarqué dans cette mascarade ?
Et cette odeur de rose qui se mêle aux relents de mes compagnons canins… beurk, beurk, beurk !
Demain, nous irons faire un shooting photo, m’a dit Annabelle hier soir.
Shotting ? Peut pas parler en chat comme tout le monde ?
Je ne me suis pas méfié de ce mot et je le regrette à présent.
Qu’avait-elle encore ajouté alors que je m’endormais bien lové dans mon panier ?
Les médailles c’est bien beau mais cela ne rapporte pas grand-chose dans notre escarcelle (voilà encore un mot inconnu du langage chat) J’aimerai quitter ce vingt-huitième étage et trouver une petite maison, nous y serions bien.
Alors à ses yeux, qu’elle a aussi bleus que les miens, je ne suis qu’un tiroir-caisse, une planche à billets, un chèque en blanc ?
Beurk ! Pitié ! Et dire qu’il en faudra une quantité des séances pareilles avant d’avoir amassé un petit magot…
Du rouge on va passer aux cotillons bigarrés puis au jaune canari, Pâques oblige, et ensuite aux senteurs de muguet et puis, et puis…
Malgré tout j’étais bien moi, au vingt-huitième étage !
Mais voilà quand Annabelle plonge ses yeux dans les miens comment lui résister ? Comment ne pas lui faire honneur une fois de plus ?
 
Serait-ce ça le grand amour ?
Foi de Zébulon, je pense bien que oui.
 
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Mil et une sujet 07/2021 - clic

Retrouvez Zébulon, chat du vingt-huitième ici

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Publié le 22 Janvier 2021

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L’enveloppe est grande… l’adresse rédigée par Maman… de quoi s’agit-il, elle ne m’en a pas parlé, hier soir, au téléphone…  

Une immense photo en noir et blanc… un montage probablement… étrange, il me fait penser à des portées musicales et des notes de musique…

Un petit billet laconique l’accompagne « Granny m’a confié ce document en décembre 1974 et elle me demande de te le confier à mon tour. Je  fais confiance à son instinct comme je te fais confiance, mon amour… Maman »

Décembre 1974 ? Quelques mois avant ma naissance !

Au revers de la photo je découvre la belle écriture de Granny…

« Comme j’aime ce montage de photos de Harold Feinstein prises à Coney Island en 1950, comme j’aime surtout ce que l’on n’y voit pas : notre bonheur à Bob et moi ! Retrouver nos amis sur la plage, danser le rock and roll, le boogie-woogie ou le slow sur des pistes improvisées à même le sable, nager, se dorer au soleil, en un mot vivre avec insouciante notre jeunesse. Les gens, là-haut sur la promenade, assis sur un banc ou déambulant, nous observaient peut-être avec un peu de nostalgie au cœur. Bob, ton père, tu ne l’as pas connu. Le conflit en Corée a fauché bien trop tôt sa fougue de jeune soldat. Mais tu es là, Wendy ma fille, sa fille, et tu es un merveilleux cadeau de la vie !

Bob, mon grand-père, je ne le connais qu’au travers de quelques clichés. Tout comme mon père d’ailleurs disparu dans un accident d’hélicoptère trois jours avant la date prévue pour leur mariage, à ma mère et lui.

Mon cœur bat la chamade, je suis troublée, secouée au plus profond de moi-même. Serions-nous liées par le même destin, Granny, Wendy, ma mère, et moi ?

Qu’a pressenti Granny lorsque je l’ai vue le mois passé ? Pourquoi en m’embrassant, alors que j’étais sur le point de rentrer à New-York, a-t-elle murmuré à mon oreille « tu as l’œil qui pétille, prends soin de toi » ?

Se doutait-elle qu’à mon tour je porte en moi une toute jeune  vie ?

Mais la vie à New-York en cette fin de septembre 2001 a-t-elle encore un sens ? Malcom, mon amour, fauché toi aussi en pleine jeunesse alors que tu accomplissais ton job de pompier, tu me manques tellement !

Réussirais-je à élever seule notre enfant ? Quelle décision faut-il prendre ?

Les notes de musique que me transmet Granny via Maman suffiront-elles pour poursuivre harmonieusement la mélodie de ma vie, de notre vie ?

Doucement je caresse l’enveloppe…

Malcom, pour toi, pour nous, pour ces femmes que j’aime et qui sont des exemples, je voudrais tellement y croire !

 

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Mil et une - sujet 03/2021 - clic

Harold Feinstein clic et clic

Coney Island années 1940-1950 -montage 1952

 

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Publié le 4 Décembre 2020

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Pépé Dédé c’est mon aïeul, le père de mon Papy. (quel titre)

Pépé Dédé - tout court - ce qu’il apprécie, en plus d’enfiler un petit verre d’une goutte capiteuse derrière la cravate, selon son expression, et de faire de la musique, ce sont les conjugaisons. (quelle idée)

Bon, j’avoue, l’hérédité saute souvent une génération, ou deux, ou trois, et moi faisant partie de la quatrième je me sens vraiment lésé.

Je ne suis plus vraiment un gamin à présent mais quand il me voit Pépé Dédé ne peut s’empêcher de me questionner « Alors la jeunesse (c’est moi) récite-moi le subjonctif imparfait du verbe quérir »

Quérir ? Voilà bien un verbe décati !

Je grimace et il rigole.

Puis il se lance sans reprendre son souffle « je quisse, tu quisses, il quît, nous quissions, vous quissiez, ils quissent »

Moi, pour ne pas être en reste, j’ajoute «amen » ce qui le fait rire davantage.

Mémé Kiki en profite alors pour mettre en avant son dada personnel et elle interpelle Pépé Dédé d’un «et le verbe danser, Dédé, sais-tu encore le conjuguer à tous les temps ou ne connais-tu plus que son passé simple si pas antérieur ? »

Pépé Dédé grimace à son tour et Mémé Kiki me fait un clin d’œil. Allons, poursuit-elle, conjugue-le à l’impératif présent !

« D… dan… » (voix de Pépé)

« Allez, courage » (voix de Mémé)

Moi, Arthur, j’en profite pour augmenter le son de la radio.

« Danse » Et Mémé se met à danser…

« Dansons » Et Pépé Dédé enlace Mémé Kiki…

« Dansez » Et moi qui ai prononcé ces mots je me débine en douce histoire de les laisser tournoyer en amoureux.

Pépé Dédé et Mémé Kiki sont un peu givrés il faut bien l’avouer mais j’aimerais tellement leur ressembler et connaître moi aussi une telle complicité.

Quand j’aurai leur âge que dansera-t-on ?

 

(j'espère ne pas faire honte à Pépé Dédé et avoir présenté une bafouille correcte)

 

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Pour Mil et une - sujet 44/2020 - clic

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Publié le 21 Novembre 2020

 

Délicieux ? Savoureux ?

Non, tout simplement BON !

 

Qu’il se taise ! Pitié !

Et elle, pourquoi elle lui sourit ?

Trop contente que ça lui goûte ?

Complice. Sale complice.

 

Comment il a pu faire cela ?

Mon propre père !

Jamais plus je le croirai.

Elle non plus, ma mère, j’la croirai plus.

 

Pourquoi on fait toujours souffrir les enfants ?

Sauvage, c’est un sauvage.

Cruel en plus avec ses "c'est  simplement bon !"

Et ma mère pareil.

J’étais si bien avant que…

 

A qui les dénoncer ? Je suis si petite.

Même Tati rigole de moi.

C’est pas du jeu. Non, je n'veux pas de leurs baisers.

Plus jamais, plus jamais.

J’ai la nausée.

Ils essaient de minimiser.

Peuvent pas comprendre.

C’est ma vie qu’ils ont bousillée.

Jamais je n’y toucherai, j’le jure.

 

Trois jours qu’ils le font durer.

Mariner, rissoler et cuire.

Dé-cou-per. Gloup !

Et maintenant ils sont là à…

Mâchouiller, avaler.

Cannibales !

Et moi, j’ai une boule. Un nœud.

 

J’ai une boule. Un nœud.

Beurk !

Haut-le-cœur.

Jamais, je ne pourrai.

Quitter la table. Tourner les talons.

Direction les toilettes.

Viiiiiiiiiiiiiite.

 

Jeannot MON lapin, ils t’ont assassiné.

 

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Pour Mil et unesujet 42/2020 - clic

Ci-dessous Julos Beaucarne chante Victor Hugo (Merci à Emma et à K)

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Publié le 31 Août 2020

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Devant la porte, elle attend en frissonnant.

Sa gorge gratouille. Fichue pollution venue de l’usine d’à côté !

Le travailleur y est confronté tout au long de sa vie. Elle, bof, elle ne fait que passer.

Bientôt huit heures quinze… D’une main énergique elle donne un deuxième coup de sonnette. Quand cette fichue porte s’ouvrira-t-elle enfin ?

Soudain, elle entend des pas précipités, un cliquetis de clés. Un tour, deux tours et la porte s’ouvre en grand sur un vestibule terne et peu accueillant.

- Entrez vite, désolé pour ce retard, dit un homme rabougri vêtu d’un vieux tablier d’un blanc douteux.

Elle fait un pas, un deuxième puis s’arrête indécise.

- Allons, suivez-moi, insiste l’homme tout en trottinant sur les vieux pavés inégaux.

Où est le beau temps que je me suis promis ?

L’interrogation est furtive dans l’esprit de la jeune femme.

Déjà elle rejoint l’homme dans une immense pièce garnie de grandes tables et d’étagères couvertes de rouleaux de tissu, plus colorés les uns que les autres.

L’homme grommelle un « pourquoi voulez-vous me voir exactement ? »

- Je me prénomme Mila. J’aimerais vous présenter quelques croquis et…

L’homme l’interrompt - « Je n’ai pas le temps de… » mais il ne finit pas sa phrase happé par le dossier étalé sur un coin de table. La jeune femme l’a tiré de son sac et déposé d’un geste brusque, presque rageur.

A présent, l’homme la bouscule, la tire par la veste et comme il se retourne elle voit ses yeux briller d’intérêt.

- Montrez, montrez-moi !

Elle ne peut s’empêcher de soupirer un ouf ! dans sa tête.

Lui feuillette, regarde et regarde encore.

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Le soleil est à présent plus haut dans le ciel et inonde de lumière l’atelier du tisserand. Ce dernier, tout rouge, tout rond d’une satisfaction qu’il voudrait dissimuler à la jeune femme, pose des questions, encore et encore.

Souriant intérieurement elle y répond sobrement. Dans son ciel de plomb personnel elle entrevoit enfin une éclaircie.

L’homme l’écoute mais ne peut s’empêcher de tendre la main et de ressaisir le dossier. Il cligne de l’œil vers tel ou tel dessin, tel assemblage de couleurs et la jeune femme cernant ses attentes l’oriente au mieux parmi ses créations.  

Familièrement il finit par demander « tu veux un café ? »

Comme elle acquiesce il poursuit d’un « dis donc ce n’est pas mal, pas mal du tout. Il y a longtemps que… » mais déjà il se détourne et, sur une étagère, saisit deux tasses ébréchées.

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- "CAMARADE SOLEIL" ce serait un beau nom pour une nouvelle collection de tissu... TA collection. Qu'en penses-tu ?

Dubitative, la jeune femme regarde le tisserand. Est-il sérieux ? Peut-elle lui faire confiance ? Puis elle se dit que c’est plutôt con de ne pas y croire. Pourquoi l’aurait-elle contacté si un brin d’espoir n’était pas en elle ?

- CAMARADE SOLEIL ? Oui, cela sonne bien.

Et de donner ainsi une identité à son travail, sa créativité, rend cette folie plus concrète. Ce matin, aurait-elle pensé vivre une journée pareille ?

Mais est-elle prête à faire entièrement confiance à un patron ?

Alors elle regarde longuement l’homme au tablier d’un blanc douteux et elle décide de ne voir que l’éclaircie qui s’élargit de plus en plus dans son ciel de plomb.

Oui, elle veut vivre et vivre à fond le beau temps qu'elle s'est promis !

 

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Pour Mil et une - sujet 31/2020 - clic

 

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Publié le 7 Août 2020

image Mil et une

Bonjour ma cousine

Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...
 

Depuis quelques jours cette vieille comptine tourne en boucle dans la tête d’Hortense. Serait-elle nostalgique ?

Non, Hortense est plutôt dans l’action ! Et tout en fredonnant elle trace de grandes lettres blanches sur trois planches de bois dénichées dans la cave. Sur l’une on peut lire vers là, sur une autre par ici et sur la troisième ailleurs.

Quelques clous, un marteau et un vieux piquet… Bricoleuse dans l’âme, il faudrait beau voir qu’elle ne parvienne pas à installer le tout au jardin.

Bonjour ma cousine

Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...
 
Vers là, par ici, ailleurs, c’est dans ces directions que se sont éparpillées les filles d’Hortense et en ce beau jour d’été elle ressent particulièrement le manque de leur présence. Satané virus !
 
Bonjour ma cousine
Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...
 
Mummmm ! La petite installation au milieu du pré fleuri est du plus bel effet. Hortense s’empresse de la photographier et de l’adresser en clin d’œil à ses trois filles. Le soleil darde ses rayons implacables, il est temps pour elle de rentrer au frais et de savourer une petite sieste bien méritée.

 

Bonjour ma cousine

Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...

 

- Maman ?

- Bonjour ma chérie, bonjour Barnabé !

- Barnabé ne se décide pas à s’endormir ce soir.

 

Ce soir ? Oui, là-bas la nuit est déjà tombée...

Une fois de plus, via l’écran de l’ordinateur, Hortense observe avidement son petit-fils. Quand la vie lui fera-t-elle la ristourne d'enfin le prendre dans ses bras, ici ou là-bas, dans ce lointain ailleurs  ?

 
Bonjour ma cousine
Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !... clic

 

La comptine chantonnée par sa grand-mère a fait merveille, paisible petit Barnabé s’est endormi.

Chut, ne le réveillons pas…

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Pour Mil et une - sujet 27/2020 - clic

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Publié le 27 Mai 2020

Philharmonie de Paris - clic et clic

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Mon aïeul Pépé DD et moi, nous fêtons aujourd’hui notre anniversaire. Moi, j’ai quatorze ans et lui quatre-vingts mais c’est Mémé Kiki la plus âgée de la famille. Pépé DD dit souvent « Kiki tu es notre chef d’orchestre ! » Je vois alors Mémé Kiki sourire mais d’une façon un peu tordue. Pourquoi ? Je ne l’ai pas encore découvert.

 

Ce soir a également lieu le concert de notre harmonie dans la salle des fêtes du village. Papa, qui la dirige depuis peu et doit faire ses preuves, est un brin nerveux. Moi, je lui ai dit «cool Dad, tout ira bien tu peux compter sur nous »

 

Pépé DD au tuba, Papy, son fils et mon grand-père, à la clarinette et moi, Arthur, à la caisse claire à défaut d’une batterie complète, nous veillons au grain, à la bonne humeur entre les musiciens et tout et tout…

 

Mon aïeul, en plus de fêter ses quatre fois vingt ans, fête également son soixantième concert annuel, ce n’est pas rien ! (Je l’appelle toujours mon aïeul parce qu’il est une des racines de mon arbre généalogique, celui que Maman avait tracé quand j’étais môme pour m’aider à m’y retrouver dans les membres de ma famille paternelle)

 

Le président de notre harmonie fait monter Mémé Kiki sur scène aux côtés de Pépé DD et lui offre un bouquet de fleurs avant d’entamer un petit discours en l’honneur d’André, notre membre jubilaire comme il nomme mon aïeul. Mémé Kiki resplendit sous son originale bien qu’habituelle crinière rouge et je suis fier d’elle comme je le suis de Pépé DD à la longue barbe tressée !

 

Les applaudissements fusent, enfin nous allons pouvoir nous exprimer, mes baguettes en frétillent d’impatience. Papa s’avance, salue le public mais au lieu de se tourner vers nous les musiciens, hommes et femmes vêtus de notre uniforme vert cactus, il tend la baguette de chef d’orchestre à Mémé Kiki, sa grand-mère, mon aïeule (j’insiste pour que vous suiviez bien mon arbre généalogique) qui n’a pas encore quitté la scène pour rejoindre sa place.

Un sourire aux coins des lèvres, Mémé Kiki s’incline brièvement vers la salle, se dirige vers le pupitre, feuillette rapidement une partition, donne trois coups brefs sur le bois du lutrin tout en nous toisant. J’en ressens des frissons le long de mon échine.

 

Geste suspendu… Un, deux ! Les bras donnent le tempo, virevoltent, insistent à gauche, à droite, indiquent l’arrière des rangs, calment la vigueur, la ressuscitent et c’est « La vie est belle » qui s’envole du sol au plafond, se répand de nos instruments jusqu’au fond de la salle subjuguée par tant de vigueur.

 

A la fin du morceau et des applaudissements enthousiastes couronnés de quelques « bis », Pépé DD rejoint son épouse qu’il embrasse, se saisit d’un micro et déclare « je l’ai toujours dit, Christine, ma Kiki, est une vraie chef d’orchestre et oui, LA VIE EST BELLE !

 

Ensuite le concert reprend son déroulé normal sous l’égide de mon père…

 

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Mémé Kiki me racontera peu après comme elle aurait aimé, elle aussi, jouer d’un instrument de musique, s’intégrer dans la fanfare de son village natal… autre temps hélas où les filles n’étaient pas prises en compte dans ce genre de loisir… elle me dira que mon père, touché par ce manque qu’il ressentait en elle, lui avait dit qu’il n’y avait pas d’âge limite pour se faire plaisir et lui avait offert ce bon moment de partage-surprise avec des musiciens…

 

Oui, la vie peut être belle ! 

 

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Pour Mil et une sujet 21/2020 - clic et clic

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Publié le 1 Mars 2020

 
J’aurai une armure et un casque avec un beau panache de plumes blanches et puis mon cheval sera blanc lui aussi, disait Gwendoline.

 

Arthur, son frère, occupé à trier ses nombreux chromos de footballeurs, ricanait : tu as déjà vu un chevalier à lunettes ? Et puis tu n’es qu’une fille…
 
- Et alors, Jeanne d’Arc aussi c’était une fille ! Tu n’as aucun imaginaire, pauvre crétin.
 
Et Gwendoline continuait à rêver sa vie. Tantôt fière chevalière, tantôt princesse choyée en son beau château perché. Parfois elle changeait de registre et partait à la découverte d’animaux étranges vivant dans des contrées lointaines. Elle était l’émule de Christophe Colomb et voguait sur la Nina ou sur la Pinta. A moins que ce ne soit sur la Santa Maria ? Bof ! Peu importe si il y avait une petite entorse à l’histoire, seule comptait l’aventure.
 
Au fil des livres et des bandes dessinées choisis dans les rayons fournis de la bibliothèque de son village, elle vivait ainsi une multitude d’aventures plus passionnantes les unes que les autres. 
 
Le Japon, si lointain que le soleil s’y levait, l’Egypte et ses pyramides majestueuses peuplées de momies, la Sibérie ou le Pôle Nord dont les seuls noms évoquaient un froid si intense qu’elle en tremblait, la jungle touffue et ses lianes tombant de la canopée, la Bretagne ou la Scandinavie aux mystérieuses légendes, la mer profonde de vingt mille lieues, l’île au trésor, les dessins rupestres ornant les grottes préhistoriques ou même la Lune là-haut dans le firmament… il y avait tant à découvrir et rien ne la rebutait.
 
Son frère se voyait le meilleur buteur de tous les temps (quel crétin !)
 
Gwendoline, c’était décidé, serait exploratrice !
 
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Arthur, après son travail à La Poste, entraîne une équipe de juniors et se donne à fond auprès de ces jeunes parmi lesquels, qui sait, germera peut-être un futur Ronaldo.
 
Gwendoline quant à elle gère désormais la bibliothèque municipale et à son tour conseille les lecteurs de tout âge, aux goûts divers.
 
Chacun à leur façon, ils sont les héros de leur propre vie et une complicité fraternelle jamais prise en défaut est un de leurs plus grands trésors.
 
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Pour Mil et une - sujet 9/2020 - clic
Illustration de Norman Rockwell - clic et clic
 
 

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Publié le 11 Février 2020

 

De marbre !

Ma décision est prise, dorénavant, je resterai de marbre et tant qu’à faire d'un marbre blanc de la plus fine qualité.

« Je le vaux bien » dixit la pub et pour une fois, je lui donne raison.

Alors fini de chercher à me culpabiliser, désormais ils n’y arriveront plus. Qu’ils se débrouillent sans moi.

J’entends déjà le tumulte et je me régale à l’avance de leurs œillades ahuries puis outrées suivies de :

- Mais maman !

- Voyons chérie !

Ou plus cajoleur (hypocrite, oui)

- Allons, ma petite fée tout à moi…

 

De marbre !

 

Et si la pile de linge sale, de linge à sécher, plier ou repasser, recoudre, allonger, raccourcir, customiser, remiser pour l’hiver ou pour l’été, de linge à trier pour le recyclage ou la revente sur le Net… (Pfff ! je reprends mon souffle…) de linge à prévoir pour le sport à l’école, la piscine, le linge à ranger dans la bonne armoire, à assembler par bonne paire, bonne taille, à ramasser sous un lit, derrière un radiateur, à désodoriser, détacher… et j’en passe… si la pile donc devient montagne ce ne sera plus de mon ressort.

 

- Comment ? C’est de la montagne qu'est extrait le marbre ?

 

Et bien oui, ce sera cette montagne qui m’aura générée, tant pis pour elle !

 

De marbre !

A bon(s) entendeur(s), salut !

 

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Pour Mil et une - sujet 6/2020 

Michelangelo Pistoletto - clic

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