Publié le 31 Janvier 2019

Rafał olbiński - clic et clic 

Certains sont définitivement cloitrés dans leur surdité

D’autres, mine de rien, tendent l’oreille

Et celui-ci demande : voulez-vous répéter, ce n’est pas clair pour moi ?

Celle-là tente malgré un certain brouhaha d’élever les idées

Le râleur, automate bien huilé, serine : c’est toujours pareil

Et l’optimiste de s’enthousiasmer : on avance

Les yaqua malgré leurs grandes idées ne mouillent pas leur liquette

Les utopiques, eux, s’accrochent à leur vision idéale

Mais les pragmatiques s’exclament : soyons réalistes

Ici on prédit un avenir sombre

Là un ciel serein

 

Tour à tour, la parole est donnée à chaque instrument de l’orchestre

On tente de repérer les couacs, les tempos trop lents ou à contretemps

Aucune fausse note ne devrait entacher l’harmonie

Et de répétition en répétition, d’écoute en écoute

Les violons s’accordent peu à peu

 

L’œuvre est ardue mais sublime à exécuter

Et chaque jour il faut s’exercer pour tenter de la magnifier

Celle que l’on nomme Notre Belle Démocratie

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

Pour Mil et une - sujet 04/2019 - clic

Voir les commentaires

Publié le 23 Janvier 2019

source image Internet - à découvrir chez Emma - clic

-----------------------
 -         Tu te souviens Ma’Jeanne du petit Jacques ? Ton ami Jacquot ? Regarde, le voilà près de toi sur la photo prise par Papa dans le verger alors que nous récoltions les pommes. Il te tenait la main en douce, c’était ton amoureux, c’était si évident… Vous aviez quoi ? Huit ans ?
Ah ! Ma’Jeanne je t’enviais un peu à l’époque. Moi c’était Emile qui me faisait rêver mais hélas Emile n’avait pas la vocation pour jouer au prince vraiment charmant et je restais en rade.
Bah ! Les années se sont écoulées, sereines, et à vingt ans à peine j’ai épousé Marcel. Je ne l’ai jamais regretté, non, jamais, c’était un bon mari et un bon père.
 
Soupir !
 
Ma’Jeanne, j’avais vingt ans et toi vingt et un. A ton tour, tu m’enviais… Ton jacquot t’avait délaissée pour courir les bals de la région et pas que les bals d’ailleurs, les jupons aussi.
A propos, tu te souviens de ta jolie robe en vichy mauve ? Attends que je retrouve l’album rouge, c’est celui de cette époque… Là, tu vois comme tu étais jolie ? Tu ressemblais à B.B. avec ce chignon un peu sauvage que je t’avais fait.
 
Soupir !
 
Si jolie et si triste…
Je n’ai pas pu supporter de te voir dépérir seule dans ton coin, Ma’Jeanne, non je n’ai pas pu…
Toutes ces photos, c’est toute notre vie et notre vie devait être belle, tu comprends ? Mmm !
Il faut… oui, il faut que je t’avoue avoir rencontré ton Jacquot un mercredi. Il me suivait dans la salle d’attente du dentiste, tu sais, le vieux docteur Gribeau…
Jacques a ricané quand je lui ai parlé de toi, de ta tristesse… Marie-Jeanne, oui, c’était des mômeries maintenant je suis un homme, je suis passé à autre chose, a-t-il dit en me défiant du regard…
Autre chose ! AUTRE CHOSE !
Ah ! Non Ma’Jeanne tu n’es pas une chose que l’on jette à la poubelle comme un vulgaire bout de papier.
 
Soupir !
 
Sur le chemin du retour, j’ai garé la voiture dans la première allée du petit bois Colin, moteur en marche, prête à surgir sur la route au passage de la Simca de Jacques, histoire de lui faire peur.
Ma’Jeanne, c’est moi qui ai eu une peur bleue quand la Simca a fait une embardée et est allée se fracasser contre un arbre. Une peur lâche qui m’a fait fuir au plus vite.
Comment Ma’Jeanne ai-je pu survivre avec cette culpabilité d’avoir causé la mort de ton Jacquot ? Comment ? Je me pose encore la question aujourd’hui…
 
Soupir !
 
Si seulement une petite étincelle apparaissait dans ton regard vide elle me rassurerait, me dirait que tu me détestes…
 
Soupir !
 
Ma’Jeanne je vais remballer les albums à quoi bon remuer tout cela. Les photos sont des crève-cœur ! Au fond c’est heureux que ton esprit ne s’en rende plus compte.
Viens que je t’embrasse !
-----------------------
 Pour Mil et une sujet 03/2019 - clic

Voir les commentaires

Publié le 13 Janvier 2019

Hugo Simberg - clic

Mots à placer pour Treize à la douzaine :
agile - température - tempérance - percussion - arôme - fuite - rire - absorber - feutré - linceul
- osier - ancillaire et le treizième pour le thème : Noël
----------------------------
Sait-elle qu’un rire innocent et gai génère parfois un pleur ?
Et que le pas feutré d’un tigre n’est pas celui, velouté, d’un chat ?
Sait-elle la température qui soudain escalade les échelons du thermomètre rendant l’atmosphère de la pièce suffocante ?
Sait-elle que tous les Noël ne sont pas paniers d’osier garnis de friandises et de fruits aux arômes exotiques ?
Agile, oui, elle se croit agile, prête à une éventuelle dérobade mais le fauve veille. Lui, la tempérance il ne connaît pas !
Et les tapisseries absorberont les cris et la percussion vaine de ses poings si fragiles sur l’armure de l’ennemi soudain dévoilé.
L’intérimaire qui a accepté cet extra pour arrondir cette fin de mois difficile a-t-elle jamais lu de vieux romans aux relents d’amours ancillaires ? Connait-elle même ce mot désuet ?
C’est Noël, oui, et elle veut encore y croire à la paix universelle. Ce n’est qu’un mauvais rêve, elle va se réveiller, rire de sa peur panique.
Ce corps pesant sur elle, ces mains qui s’insinuent partout, qui soudain lui serrent le cou seraient-ils réels ?
C’est Noël, un homme hagard s’enfuit dans la nuit.
 
Elle, souillée, dégradée, éloigne d’elle dans un dernier sursaut le linceul qui semble déjà l’envelopper et cherche au plus profond de son être une dernière étincelle de vie.
C’est Noël ! Paix aux âmes de bonne volonté !
----------------------------

Voir les commentaires

Publié le 8 Janvier 2019

Jeannot, mon homme, veut toujours jouer au plus malin ! Quoique…

Moi, pragmatique et un rien futée, je lui ai suggéré à la mi-décembre d’attendre janvier et la période des soldes pour acheter enfin le collier de perles qu’il me promet depuis… cinq ans. Oui, cinq ans !

Quatre Noël passés à espérer être exaucée, quatre Noël à me retrouver au final face à un flacon d’un parfum bon marché couplé en prime d’une bonne pinte de désappointement.

Le cinquième allait s’avérer le bon et quand j’ai découvert sous le sapin une enveloppe contenant une photo de perle lovée dans sa coquille j’ai sauté au cou de Jeannot, comblée, enfin !

-         Tu le sais, hein, mon Jeannot que les perles détestent le parfum !

A la lueur de son regard ahuri suite à ma réflexion, j’aurais dû me douter qu’il y avait huître sous roche mais voilà, l’amour rend aveugle.

Quelques jours de patience et je serai parée de nacre. Mentalement j’en admirais déjà l’effet irisé dans le miroir.

-         Euh, m’a demandé Jeannot le soir de la saint Sylvestre, il faut combien de perles autour de ton cou de cygne, ma gazelle ?

(Hum ! Un simple tour de cou ? Avare ! Radin ! Rustre !)

-         Farceur, lui ai-je répondu faussement souriante le laissant dans l’expectative.

Sourire qui a tourné en grimace quand j’ai aperçu les plateaux d’huîtres livrés par un traiteur.

-         J’ai eu peur qu’elles ne soient plus assez fraîches au premier jour des soldes aussi en ai-je commandé pour ce soir. J’espère qu’il y en aura assez pour te confectionner un collier de perles et que cela nous goûtera. Moi, ce sera la première fois que j’en mangerai, a avoué ma moitié.

Sniff ! Sniff ! Euh, ne m’as-tu pas dit que les perles détestent le parfum ?

 -         Jeannot ?

 -         Oui !

 -         Toutes les huîtres ne contiennent pas de perle. Un collier s’achète dans une bijouterie, pas chez l’écailleur…

 -         Ah bon ! Si tu le dis…

 -         Je dis que tu es une perle d’INCULTURE, Jeannot, et je pèse mes mots.

 

Le premier coup de sonnette a coïncidé avec le premier éclat de rire de Jeannot. Moi, je ne voyais rien de risible dans la situation. J’étais désappointée et voici qu’un intrus allait nous surprendre en pleine dispute.

Tout en me glissant un écrin entre les mains mon homme a chuchoté : file te préparer, j’ai invité les voisins pour l’apéro !

En riant de plus belle il a crié : j’arrive ! J’arrive !

Tous les voisins ont applaudi quand je suis apparue dans ma petite robe noire mettant en valeur le lustre des trois rangs de perles fines.

J’ai embrassé Jeannot et lui ai murmuré à l’oreille : tu sais, deux rangs de fausses perles m’auraient suffi.

-         Heu, avec tout l’argent thésaurisé pendant cinq ans et ta patience d’ange, tu ne pouvais prétendre à du toc, toi la fille qui m'accompagne, a t’il chuchoté en me serrant fort tout contre lui.

Puis il a débouché les bouteilles mises au frais à mon insu et a présenté les plateaux d’huitres.

Oui, Jeannot, mon homme, veut toujours jouer au plus malin mais il faut bien l'avouer, c’est une perle rare !

-------------------------------

Pour Mil et une sujet 01/2019 - clic

Voir les commentaires