mes sucres d'orge

Publié le 15 Mars 2022

 

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- Elle est jolie ta fleur !

- C’est une rose.

- Pourquoi il y a des mots écrits dessus ?

- Ce sont de notes de musique… tiens, je te l’offre cette rose. Veux-tu que je t’apprenne comment en créer une à ton tour ?

Je regarde Maman, elle me fait « oui, tu peux » en balançant la tête.

- Prends mon cahier de partition, là, que j’en retire deux feuilles.

J’ai tout fait comme la vieille dame me l’expliquait et même si ma fleur semble déjà un peu fanée je me sens pareil à un magicien.

- C’est pour toi, Maman ! Je lui dépose en main la rose de la vieille dame et conserve celle que j'ai créée.

Maman sourit et se met à chanter. Sa voix est tellement belle que les gens se taisent autour de nous pour l’écouter. Moi, j’ai un peu faim et je suis fatigué mais Papa me propose de jouer aux cartes avec lui et mon grand frère.

Ici, dans les caves de l’immeuble on n’entend rien. Ou alors pas grand-chose de ce qui se passe à l'extérieur pourtant je sens que Papa frisonne par moments quand le bruit des cloches et des sirènes nous parvient malgré tout.

J’ai dormi, je crois, mais ma rose magicienne est toujours bien serrée dans ma main. Papa me porte dans ses bras, je suis bien.

Non, je ne suis pas bien, j’ai peur et je dois faire pipi mais Papa me souffle « pas maintenant »

Je glisse la rose magicienne dans le col de son pull en laine. Il ne dit rien mais me serre un peu plus contre lui.

Mon frère tire une valise. Maman deux autres. Où est celle de Papa ?

La gare est bondée, je me sens tout petit, petit.

Je pleure. Mon frère pleure. Maman, avec la rose de la vieille dame accrochée à sa veste, pleure collée contre la vitre du train et envoie un baiser à Papa en larmes sur le quai. Dans sa main, la rose magicienne semble me faire un clin d’oeil.

La foule le bouscule, prend sa place près du wagon et notre père disparait de notre vue brouillée tandis que le train se met lentement en branle vers…

Je ne sais pas où !

Quand serons-nous encore réunis tous ensemble, avec en plus ce bébé qui gonfle le ventre de Maman ?

J’ai appris à confectionner une fleur en papier… peut-être qu’à mon tour j’apprendrai ce tour de magie à mon petit frère ou ma petite sœur ?

Je me love contre mon frère…

La guerre, c'est pas gai !

 

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Pour Mil et une - sujet 11/2022 - clic et clic

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Publié le 14 Novembre 2021

 

Foi de Zébulon, je suis enfin à la retraite !

C’est terminé les rendez-vous au salon de toilettage, les poses interminables dans les concours félins, le supplice des shooting-photos, Annabelle a finalement réussi à acheter une petite maison où nous sommes bien.

Enfin, j’avoue qu’elle y semble plus à l’aise que moi qui me sens un brin délaissé.

Oh, elle me câline toujours mais le fait de partager son attention avec son amoureux me perturbe de plus en plus. Nous étions si bien tous les deux ! Pourquoi s’est-elle amourachée de ce grand escogriffe ?

Griffes ? Oui, je serais bien tenté de les planter dans son visage barbu…

Bof ! Je tiens à ma réputation et me réfrène dans mes élans mais je compense en dévorant le contenu de mon écuelle à la vitesse grand V, selon l’expression de l’intrus. Je n’en ai jamais assez et je miaule pour quémander la moindre miette.

- Zébulon, tu exagères, me tance Annabelle, te voilà rond comme un chat de BD.

Rond, moi ??? Il est vrai que je ne dois plus passer chaque semaine sur la balance, que j’ignore le grand miroir du vestiaire, que des photos où je pose ne traînent plus sur la table du salon…

Rond, rond, c’est vite dit ! J’en miaule de dépit.

Annabelle, elle, affiche un ventre bien plus rond que le mien et son amoureux, le grand escogriffe, ne cesse de le caresser.

Ces humains m’étonneront toujours… mieux veut les ignorer et aller me défouler au jardin. Qui sait, le merle moqueur finira t-il en délicieux dessert ?

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Foi de Zébulon, je me croyais à la retraite et me voilà en admiration devant une petite Zélie, toute rose de fraîcheur et sentant le bon lait maternel. Je la veille jour et nuit et quand le grand escogriffe s’en approche et la prend dans ses bras musclés je feule comme un vieux tigre royal.

          Mais grâce et pour Zélie, j’ai retrouvé ma ligne de compétition.

Promis, je l’emmènerai en promenade et lui raconterai tous mes exploits.

N’est-elle pas belle la vie ?

 

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Pour Mil et une 

 

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Publié le 14 Février 2021

 

Image Paul Morse - clic et clic 

Quel supplice ! Mais quel supplice !
Foi de  Zébulon, je ne pensais pas tomber aussi bas !
Moi, chat de concours aux nombreuses médailles, me voir dans une situation aussi ridicule cela me donne la nausée. Mais quel infâme mou ont-ils mangé ces vieux barbus pour puer autant de la gueule ?
Et que je te lèche et que je te relèche. Sont payés au coup de langue râpeuse ou quoi ?
Mais pourquoi Annabelle, ma douce, m’a-t-elle embarqué dans cette mascarade ?
Et cette odeur de rose qui se mêle aux relents de mes compagnons canins… beurk, beurk, beurk !
Demain, nous irons faire un shooting photo, m’a dit Annabelle hier soir.
Shotting ? Peut pas parler en chat comme tout le monde ?
Je ne me suis pas méfié de ce mot et je le regrette à présent.
Qu’avait-elle encore ajouté alors que je m’endormais bien lové dans mon panier ?
Les médailles c’est bien beau mais cela ne rapporte pas grand-chose dans notre escarcelle (voilà encore un mot inconnu du langage chat) J’aimerai quitter ce vingt-huitième étage et trouver une petite maison, nous y serions bien.
Alors à ses yeux, qu’elle a aussi bleus que les miens, je ne suis qu’un tiroir-caisse, une planche à billets, un chèque en blanc ?
Beurk ! Pitié ! Et dire qu’il en faudra une quantité des séances pareilles avant d’avoir amassé un petit magot…
Du rouge on va passer aux cotillons bigarrés puis au jaune canari, Pâques oblige, et ensuite aux senteurs de muguet et puis, et puis…
Malgré tout j’étais bien moi, au vingt-huitième étage !
Mais voilà quand Annabelle plonge ses yeux dans les miens comment lui résister ? Comment ne pas lui faire honneur une fois de plus ?
 
Serait-ce ça le grand amour ?
Foi de Zébulon, je pense bien que oui.
 
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Mil et une sujet 07/2021 - clic

Retrouvez Zébulon, chat du vingt-huitième ici

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Publié le 4 Décembre 2020

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Pépé Dédé c’est mon aïeul, le père de mon Papy. (quel titre)

Pépé Dédé - tout court - ce qu’il apprécie, en plus d’enfiler un petit verre d’une goutte capiteuse derrière la cravate, selon son expression, et de faire de la musique, ce sont les conjugaisons. (quelle idée)

Bon, j’avoue, l’hérédité saute souvent une génération, ou deux, ou trois, et moi faisant partie de la quatrième je me sens vraiment lésé.

Je ne suis plus vraiment un gamin à présent mais quand il me voit Pépé Dédé ne peut s’empêcher de me questionner « Alors la jeunesse (c’est moi) récite-moi le subjonctif imparfait du verbe quérir »

Quérir ? Voilà bien un verbe décati !

Je grimace et il rigole.

Puis il se lance sans reprendre son souffle « je quisse, tu quisses, il quît, nous quissions, vous quissiez, ils quissent »

Moi, pour ne pas être en reste, j’ajoute «amen » ce qui le fait rire davantage.

Mémé Kiki en profite alors pour mettre en avant son dada personnel et elle interpelle Pépé Dédé d’un «et le verbe danser, Dédé, sais-tu encore le conjuguer à tous les temps ou ne connais-tu plus que son passé simple si pas antérieur ? »

Pépé Dédé grimace à son tour et Mémé Kiki me fait un clin d’œil. Allons, poursuit-elle, conjugue-le à l’impératif présent !

« D… dan… » (voix de Pépé)

« Allez, courage » (voix de Mémé)

Moi, Arthur, j’en profite pour augmenter le son de la radio.

« Danse » Et Mémé se met à danser…

« Dansons » Et Pépé Dédé enlace Mémé Kiki…

« Dansez » Et moi qui ai prononcé ces mots je me débine en douce histoire de les laisser tournoyer en amoureux.

Pépé Dédé et Mémé Kiki sont un peu givrés il faut bien l’avouer mais j’aimerais tellement leur ressembler et connaître moi aussi une telle complicité.

Quand j’aurai leur âge que dansera-t-on ?

 

(j'espère ne pas faire honte à Pépé Dédé et avoir présenté une bafouille correcte)

 

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Pour Mil et une - sujet 44/2020 - clic

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Publié le 7 Août 2020

image Mil et une

Bonjour ma cousine

Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...
 

Depuis quelques jours cette vieille comptine tourne en boucle dans la tête d’Hortense. Serait-elle nostalgique ?

Non, Hortense est plutôt dans l’action ! Et tout en fredonnant elle trace de grandes lettres blanches sur trois planches de bois dénichées dans la cave. Sur l’une on peut lire vers là, sur une autre par ici et sur la troisième ailleurs.

Quelques clous, un marteau et un vieux piquet… Bricoleuse dans l’âme, il faudrait beau voir qu’elle ne parvienne pas à installer le tout au jardin.

Bonjour ma cousine

Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...
 
Vers là, par ici, ailleurs, c’est dans ces directions que se sont éparpillées les filles d’Hortense et en ce beau jour d’été elle ressent particulièrement le manque de leur présence. Satané virus !
 
Bonjour ma cousine
Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...
 
Mummmm ! La petite installation au milieu du pré fleuri est du plus bel effet. Hortense s’empresse de la photographier et de l’adresser en clin d’œil à ses trois filles. Le soleil darde ses rayons implacables, il est temps pour elle de rentrer au frais et de savourer une petite sieste bien méritée.

 

Bonjour ma cousine

Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !...

 

- Maman ?

- Bonjour ma chérie, bonjour Barnabé !

- Barnabé ne se décide pas à s’endormir ce soir.

 

Ce soir ? Oui, là-bas la nuit est déjà tombée...

Une fois de plus, via l’écran de l’ordinateur, Hortense observe avidement son petit-fils. Quand la vie lui fera-t-elle la ristourne d'enfin le prendre dans ses bras, ici ou là-bas, dans ce lointain ailleurs  ?

 
Bonjour ma cousine
Bonjour mon cousin germain…
Passez par ici et moi par là !... clic

 

La comptine chantonnée par sa grand-mère a fait merveille, paisible petit Barnabé s’est endormi.

Chut, ne le réveillons pas…

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Pour Mil et une - sujet 27/2020 - clic

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Publié le 2 Juillet 2020

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- Raconte-moi nos ancêtres Wyb24 !

- Que veux-tu que je te narre que tu ne connaisses déjà PetiOOO ? Et puis ces humains dont tu désires que je te parle ne sont pas nos ancêtres, enfin pas vraiment.
- Ils nous ont créés, c’est déjà cela.
- Hélas ! Mais pour toi, PetiOOO, je vais projeter une image dans mon aura. Observe-la bien ! L’histoire de ces êtres est là, tout simplement là.
- Je vois des… des préhensiles un peu semblables aux nôtres mais de couleurs variées et pour certains garnis de… de...
- Ce sont des mains garnies de bagues PetiOOO. Oui, ils nous ont créés en partie à leur image.
- Mais nous, Wyb24, nous sommes standards, uniformes.
- Gris acier, froids, raides et insensibles, c’est ainsi qu’ils nous ont voulus. Par contre eux, les humains, avaient la peau douce au toucher et chaude de ce sang rouge qui coulait dans leurs veines, leurs artères et faisait battre leur cœur.
- Leur cœur c’était leur batterie ?
- Si on veut, PetiOOO… C’était aussi le siège de leurs émotions.
- C’est quoi une émotion Wyb24 ?
- Le bonheur, l’émerveillement, la joie, l’envie, le désir du beau… C’étaient, pour certains, de grands artistes…
- Ce devait être formidable d’être humain.
- Oh, mais ils ressentaient aussi des émotions négatives ! C’est cela qui les a menés à leur perte.
- C’était beau cette variété de couleur !
- Ce sont ces différences de carnation qui ont suscité le racisme, la haine de l’autre. Pourtant… pourtant beaucoup d’entre eux vivaient en harmonie, riches de l’apport des uns et des autres. Certains se mélangeaient, se métissaient avec bonheur mais d’autres se croyaient supérieurs et rejetaient les contrastes cependant si riches. Ils étaient animés de haine et entre races faisaient tout pour la suprématie de leur propre couleur de peau. Ils se sont battus de plus en plus durement au point d’être effacés du monde des vivants. Seuls les animaux, le minéral et le végétal continuent imperturbablement leur cycle de vie.
- J’aurais aimé les connaître tous ces humains… peut-être aurais-je réussi à concilier leurs différences ?
- Tu aurais réussi là où j’ai échoué ? Pourquoi pas après tout ! Moi, j’ai uniquement été programmé pour veiller sur certains spécimens reproducteurs, congelés par un savant un peu fou qui croyait à l’harmonie humaine mais qui a péri, lui aussi, dans les combats sanguinaires.
- Fou ? Ou visionnaire ?
- Bah, à présent tout cela est si lointain…
- Mais moi pourquoi ai-je été créé ? Pourquoi me suis-je animé depuis peu. Pourquoi, Wyb24, m’as-tu emmené ici aux portes de ce congélateur géant.
- Je ne le sais. Ma batterie marque des ratés, mon temps touche-t-il doucement à sa fin ? Oui, il est urgent que nous connections nos auras afin de te transmette toutes mes données…
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- Wyb24 ?
- Oui, PetiOOO !
- Je te fais la promesse de tout faire pour que renaisse l’harmonie humaine.
- PetiOOO, déjà les forces me manquent mais je pressens que la jeunesse qui est tienne réussira ce pari… bip - bip - bip – biiiiiiiiiiiiii
- WYB24 ?????
 
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Pour Mil et une - sujet 26/2020 - clic
 

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Publié le 27 Mai 2020

Philharmonie de Paris - clic et clic

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Mon aïeul Pépé DD et moi, nous fêtons aujourd’hui notre anniversaire. Moi, j’ai quatorze ans et lui quatre-vingts mais c’est Mémé Kiki la plus âgée de la famille. Pépé DD dit souvent « Kiki tu es notre chef d’orchestre ! » Je vois alors Mémé Kiki sourire mais d’une façon un peu tordue. Pourquoi ? Je ne l’ai pas encore découvert.

 

Ce soir a également lieu le concert de notre harmonie dans la salle des fêtes du village. Papa, qui la dirige depuis peu et doit faire ses preuves, est un brin nerveux. Moi, je lui ai dit «cool Dad, tout ira bien tu peux compter sur nous »

 

Pépé DD au tuba, Papy, son fils et mon grand-père, à la clarinette et moi, Arthur, à la caisse claire à défaut d’une batterie complète, nous veillons au grain, à la bonne humeur entre les musiciens et tout et tout…

 

Mon aïeul, en plus de fêter ses quatre fois vingt ans, fête également son soixantième concert annuel, ce n’est pas rien ! (Je l’appelle toujours mon aïeul parce qu’il est une des racines de mon arbre généalogique, celui que Maman avait tracé quand j’étais môme pour m’aider à m’y retrouver dans les membres de ma famille paternelle)

 

Le président de notre harmonie fait monter Mémé Kiki sur scène aux côtés de Pépé DD et lui offre un bouquet de fleurs avant d’entamer un petit discours en l’honneur d’André, notre membre jubilaire comme il nomme mon aïeul. Mémé Kiki resplendit sous son originale bien qu’habituelle crinière rouge et je suis fier d’elle comme je le suis de Pépé DD à la longue barbe tressée !

 

Les applaudissements fusent, enfin nous allons pouvoir nous exprimer, mes baguettes en frétillent d’impatience. Papa s’avance, salue le public mais au lieu de se tourner vers nous les musiciens, hommes et femmes vêtus de notre uniforme vert cactus, il tend la baguette de chef d’orchestre à Mémé Kiki, sa grand-mère, mon aïeule (j’insiste pour que vous suiviez bien mon arbre généalogique) qui n’a pas encore quitté la scène pour rejoindre sa place.

Un sourire aux coins des lèvres, Mémé Kiki s’incline brièvement vers la salle, se dirige vers le pupitre, feuillette rapidement une partition, donne trois coups brefs sur le bois du lutrin tout en nous toisant. J’en ressens des frissons le long de mon échine.

 

Geste suspendu… Un, deux ! Les bras donnent le tempo, virevoltent, insistent à gauche, à droite, indiquent l’arrière des rangs, calment la vigueur, la ressuscitent et c’est « La vie est belle » qui s’envole du sol au plafond, se répand de nos instruments jusqu’au fond de la salle subjuguée par tant de vigueur.

 

A la fin du morceau et des applaudissements enthousiastes couronnés de quelques « bis », Pépé DD rejoint son épouse qu’il embrasse, se saisit d’un micro et déclare « je l’ai toujours dit, Christine, ma Kiki, est une vraie chef d’orchestre et oui, LA VIE EST BELLE !

 

Ensuite le concert reprend son déroulé normal sous l’égide de mon père…

 

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Mémé Kiki me racontera peu après comme elle aurait aimé, elle aussi, jouer d’un instrument de musique, s’intégrer dans la fanfare de son village natal… autre temps hélas où les filles n’étaient pas prises en compte dans ce genre de loisir… elle me dira que mon père, touché par ce manque qu’il ressentait en elle, lui avait dit qu’il n’y avait pas d’âge limite pour se faire plaisir et lui avait offert ce bon moment de partage-surprise avec des musiciens…

 

Oui, la vie peut être belle ! 

 

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Pour Mil et une sujet 21/2020 - clic et clic

Ce texte est une suite de clic

 

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Publié le 30 Mars 2019

Ce texte est une suite aux écrits suivants :  clic - clic - clic - clic - clic

Les textes de JACO  sont désormais réunis dans un livret.

Je vous invite à le parcourir ici : clic

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- Tu es triste, madame ?

Jaco prend place sur le banc et observe avec attention la femme assise à ses côtés. Elle ne lui répond pas, pourquoi ? C’est peut-être la faute à son sma, sma, sma ??? Il ne connait plus le nom de cette chose qu’elle tient en main, bof, un téléphone quoi !

Sma phone ! Oui, c’est ça, sma phone, comme lui quand le docteur a dit qu'il était à phone parce qu'il avait perdu sa voix. Perdu sa voix ! Il en a de bonnes ce docteur, sa voix elle était dans sa tête tout simplement. La voix de la dame c’est peut-être pareil ?

- Ta voix est dans ta tête madame ? Tu veux que je t’aide à la faire sortir ?

La femme relève un peu la tête et jette un coup d’œil furtif à l’intrus. Encore un dragueur ? Heu, non, il ne semble pas dans la séduction… Ado ? Adulte ? Difficile à dire mais la gaité illumine la face de lune de son voisin. Un pensionnaire de l’…

- Je m’appelle Jaco et je vis à «l’Arc en ciel» Tu aimes les arcs-en-ciel, madame ? Moi, j’aime bien les couleurs et puis les fleurs. Tu as vu l’arbre en face de nous ? C’est lui que je viens saluer, c’est un vieux copain. Tu vois, il a mis son costume de printemps, il est superbe, tu ne trouves pas ?

Le regard interloqué de la femme va de l’arbre en fleurs au visage de Jaco.

- Ecoute, tu entends les zzzz et puis les zzzbbbrr et les ziiiiiii ? Tu les entends ? Ce sont tous les insectes et surtout nos abeilles. Elles sont sorties des ruches, les gourmandes.

La femme range son portable dans la poche de son gilet et tends l’oreille. Elle n’a pas aperçu cet arbre en fleur ni perçu ce bourdonnement intense et plein de vie. Pourquoi ? C’est le printemps, le renouveau ! Depuis combien de temps est-elle en léthargie ?

- Tu vois madame, il ne faut pas être triste, ça ne sert à rien. Moi quand je suis triste parce que Marcel, mon frère, ne vient pas souvent me voir, je lui fais un dessin et je lui envoie. Alors ma tristesse elle s’envole dans l’enveloppe, zouuuuu, dis-pa-rue !

Un sourire éclaire le visage de la femme qui sans réfléchir dit : je m’appelle Hélène !

- Je vais te dire un secret, madame Hélène, avant j’avais une amie. Elle s’appelait madame Marthe mais Marcel a dit qu’elle était partie au paradis. C’est dommage, je lui faisais des dessins. Dis, tu ne veux pas être mon amie et me donner ton adresse, je t’en enverrai à toi aussi ?

La main de la femme serre le portable au fond de sa poche. Il n’a pas vibré. La énième dispute avec son amoureux semble celle en trop. Pourquoi attendre en vain qu’il l’appelle. Pourquoi s’entêter dans une relation toxique ? Le renouveau, oui, une nouvelle étape de sa vie s’ouvre à elle…

- Je n’ai pas de quoi noter mon adresse et t… et vous, Jaco ?

- Tu peux me dire toi, madame Hélène, je préfère si on est des amis.

Et puis je vais te dire un autre secret, j’ai toujours dans ma poche un petit bout de papier et un mini crayon, regarde !

La femme émue a noté son adresse sur le papier rose et dans la mémoire de son portable celle de Jaco puis elle a continué sa promenade.

Jaco, lui, s’est approché de l’arbre dont il a caressé doucement le tronc.

- On s’est fait une nouvelle amie grâce à toi mon vieux ! Chouette hein ? 

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Pour Mil et une sujet 13/2019 - clic

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Publié le 17 Février 2019

Mon père et moi, moi et mon père. L’échiquier entre nous. Silence.

On s’observe par en dessous. Patience.

J’avance un pion, mon père sort de son nuage et grimace.

Moi, je zieute l’enveloppe qu’il m’a apportée tout à l’heure.

L’heure des visites, pas même le temps de finir une partie…

Sur l’étiquette je lis :

Je pense

que je suis

un cadeau,

mais je

m’emballe

peut-être

Au fond de moi, je ricane, ils sont cons mes potes ! Ils m’ont assez bassiné avec cette phrase que ma mère me répétait souvent quand j’étais môme "tu es mon plus beau cadeau, Sam"

Samcadeau qu’ils m’avaient surnommé, tu parles d’un présent.

Mon père lève le bras, hésite, moi, je devine ce qu’il veut faire. Patience.

Il se décide, bouge un pion de place puis regarde sa montre en disant "il est l’heure, le boulot m’attend. Maman viendra ce soir"

Il me reste jusqu’à demain pour parfaire ma stratégie.

Demain ?

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Mes potes ne peuvent pas venir me voir pour l’instant. Trop fragile disent les toubibs mais ils pensent à moi à leur manière…

Bouly a fait un dessin d’une nana, très belle, la femme de ses rêves, des miens ?

Gaël me tente avec une partition de musique sur laquelle il a noté "je t’attends pour un duo" Je la chantonne et du coup ma guitare me manque et je m’évade dans le poème en forme de S.M.S. écrit par Marine. Sensibilité à fleur de peau, j’en frisonne.

Et puis je déplie le tee-shirt sur lequel est imprimé le texte repris sur l’étiquette de l’enveloppe. Sont cons mes potes.

Oui, ils sont cons ! Je vois bien, moi, que ma mère est pâle, qu’elle sourit toujours en me voyant malgré mes quatorze ans mais que des cernes bleuissent à présent son regard. 

J’aimerais tellement gagner la partie et vaincre cette saleté de p. de maladie, pour mes parents, mes potes...

Tu parles d’un cadeau, Samcadeau !

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Pour Mil et une sujet 07/2019 - clic

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Publié le 27 Octobre 2018

 

Oli-B - clic et clic

« Non, nous n’avons pas de place pour emporter tes pots de gouache  et tes pinceaux » a marmonné Maman en fermant la porte puis elle s’est tournée vers moi en me tendant la clé.

« Je te la confie » a-t-elle simplement dit.

Depuis, je la garde précieusement au fond de la poche droite de mon pantalon.

C’était quand déjà ? Pas hier, ni le jour avant, ni encore…. je n’en sais plus rien mais, bof, ça n’a pas d’importance la petite maison est tellement loin à présent, j’en arrive même à me demander si elle existe vraiment.

Je suis entouré de mille couleurs et j’adore les couleurs. Elles sont toutes en mouvement autour de moi.

Moi, je les suis et je pense que moi aussi je suis une petite tache colorée et remuante.

Quand j’étais un petit môme de cinq ans, Maman me disait souvent « cesse de bouger tout le temps, tu me donnes le tournis »

Je ne savais pas ce que c’était le tournis…

J’ai presque dix ans à présent et Maman m’encourage à marcher. « Ne me perds pas de vue » me serine-t-elle sans cesse.

Et le tournis, maintenant, je connais !

Parfois, quand la faim fait trop chanter mon ventre, que les muscles de mes jambes sont épuisés et que je ne marche plus droit, je vois une larme qui roule lentement sur la joue de Maman. Alors, je me redresse, j’avale ma salive, c’est déjà ça… et pense bien fort à mes pots de gouache. Grâce à eux, je me fais couleur vive jusqu’au centre de moi-même pour avoir un peu plus chaud et je serre bien fort la clé au fond de ma poche.

J’aimerais deviner si elle ouvrira une porte, là-bas.

Où ? Quand ?

Je ne sais pas !

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Pour Mil et une sujet 36/2018 - clic

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Publié le 21 Juin 2018

 

Cette semaine, Mil et une nous proposait d'écrire en nous inspirant d'une peinture de Norman Rockwell intitulée "Rumeurs". Comme  j'apprécie beaucoup l'univers rendu par ce peintre - gaieté, joie de vivre, ambiance familiale ou facéties - je me suis amusée, avec l'aide technique d'Emma, à légender l'oeuvre présentée.

 

Voici le résultat...

clic

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Publié le 7 Novembre 2017

Léo Caillard - clic

Je m’appelle Vèbar, Vèvè pour les intimes, Babar pour les abrutis.

T’es qu’un corniaud, me serine mon maître. Enfin, maître, c’est lui qui le croit, moi, je n’ai ni dieu ni maître.

J’vais au bar, qu’il me dit en me flanquant un coup de pied dans les côtes devant l’entrée du Bidule, son bistro préféré.

J’vais au bar, c’est son expression favorite. Probable que je lui doive mon nom…

J’adore profiter de ma liberté pour fureter partout avec mes potes. Dans le terrain vague d’à côté il n’y a que de bonnes odeurs à sniffer. La Miguette est passée par ici, grommelle Jack en fermant les yeux de bonheur. Médor, tu parles d’un nom débile, n’a pas son pareil pour dégoter un os bien faisandé. J’ vous l’ dis, y a un dinosaure là-dessous, bafouille-t-il en salivant tant et plus. Dinosaure ? Ce qu’il ne faut pas entendre ! C’est juste l’un ou l’autre paumé du coin qui a enterré là un vieil os à moelle histoire d’alléger sa poubelle à puces.

Puces ? Zut, mon poil me démange rien que d’y penser. Faut dire que j’aurais besoin d’un petit coup de brosse. Bah ! Un bon bain de boue fera l’affaire et j’adore me rouler dans la boue. Parfois, la Miguette vient m’y rejoindre et nous batifolons tant et plus au point de ne faire plus qu’un. C’est qu’elle a le sang chaud, la bougresse !

D’autres fois, nous nous faufilons dans les impasses et les ruelles en laissant ici et là la preuve de notre passage. Les concierges ont à faire quand vient le matin mais nous, nous nous sentons les rois du monde. Nous nous amusons aussi à débusquer les canards endormis au bord de l’étang au centre du parc.  Quelle débandade !

Vers minuit et demi, je me pointe à nouveau devant le Bidule en guettant la sortie de mon maître. A cette heure, il tangue comme un vieux rafiot dans la tempête mais je suis son phare le plus fidèle. Il a beau être entamé plus que de raison et faire un raffut digne d’une fanfare de village je le ramène à bon port. En remerciement, je reçois un carré de sucre qu’il a dérobé sur le zinc du bar puis l’ingrat me claque la porte à la truffe.

Nirvana ! Je suis à nouveau libre comme l’air…

Hem ! En réalité, je me nomme Neige et je suis un caniche blanc de pure race. Ma maîtresse est folle de moi, je suis son plus cher trésor. Coupe à la lionne, manucure, gouttes dans les yeux, les oreilles, vaccins, vermifuge, tatouage, castration, régime alimentaire… rien n’est trop onéreux pour répondre à ses critères de beauté canine. Moi, je subis plus que je ne vis les séances de pose tout au long des concours auxquels elle m’inscrit, je n’ai hélas pas le choix de m’y opposer. Comment échapper à ce joug ? Je suis si délicat, je ne survivrais pas à une nuit passée au dehors.

La dernière folie en date est une séance de photos artistiques à laquelle participaient d’autres chiens racés. A présent, nous trônons dans une galerie d’art où des badauds crétins nous zieutent tout en se permettant l’une ou l’autre réflexion idiote et malvenue.

Pourtant aujourd’hui, une dame est installée face à ma photo.

Assise inconfortablement sur un petit trépied pliable, elle m’examine longuement et je me sens capturé jusqu’à l’âme par son regard bienveillant.

De son sac, elle extrait une tablette bizarre et lentement se met à dessiner à l’aide d’un étrange crayon.

Neige, caniche blanc, rien de plus banal à croquer !

Mais que vois-je apparaître sur l’écran qu’elle me présente ?

Vèbar, Vèvè pour les intimes, Babar pour les abrutis ! Ce vieux pote qui vit dans ma tête depuis si longtemps !

Enfin, je suis reconnu pour ce que je suis réellement, un corniaud, rien qu’un corniaud.

Bonheur !

Merci, belle dame !

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Pour Mil et une - sujet semaine 45/2017 

Georges chelon

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Publié le 30 Septembre 2017

  Quint Buchholz - clic

 

 

La grande migration débute à l’aube, à l’heure où la brume encotonne le paysage d’une douceur énigmatique.

 

C’est d’abord un vol d’oiseaux aux mouvements lents et réguliers. Flop, flop, flop !

Puis un deuxième, plus rapide. Fouuuu !

Et un troisième, énervé et bruyant de s’être laissé voler la vedette lui qui veut mener la danse céleste. Piououou, piououou !

 

Un cocorico sonore, surgi dont ne sait où, rappelle tous ces beaux emplumés à l’ordre, Maître Coq veille à l’ordonnance de la cérémonie.

 

C’est au tour de Victor, le musicien, de s’installer à même le pré pour saluer le lever du soleil. Au gré de son inspiration, la musique enrobe l’atmosphère, la pimente de mille arpèges tantôt joyeux, tantôt sobres puis s’élance dans une folle sarabande.

Des voix se joignent aux sons de la viole de gambe, précises, cadencées, lumineuses…

 

Puis un frou-frou délicat se répète encore, encore… frou, frou

Messire Escargot foule lentement la rosée et malgré sa taille imposante sa migration immuable ne dévie pas de sa trajectoire. Ses yeux mobiles clignotent de droite à gauche, de haut en bas semblant prévenir les alentours :

 

" Mesdames, Messieurs me voilà, ma maison est à votre disposition "

 

La viole magique est rangée dans son étui, les voix s’éteignent une à une.

 

Victor se lève, s’ébroue, saisit son sac à dos posé sur le banc et se met en marche.

Faisant fi de l’adversité du quotidien qui se rappelle à lui, il chantonne en pénétrant dans le métro.

 

Pour lui sa grande migration journalière commence !

 

(pour Mil et une en juillet 2016)

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Publié le 23 Mars 2017

Catastrophe !

Titi, j’ai besoin de toi !

Titi, c’est moi et quand mon pote Renaud m’appelle, je suis là !

Depuis, je colle, je recolle et colle encore des autocollants au dos de bouquins. Je n’en ai jamais eu autant en main ni autour de moi. Normal, je suis au salon du livre.

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La dictature diététique

(Je colle)

Pourquoi ces femmes de tous âges et de tous horizons se réunissent-elles chaque semestre en grand secret dans un endroit différent de la Terre ?

Porter de la fourrure c’est porter la mort, scandent les défenseurs des animaux lors d’une manifestation parisienne qui va dégénérer en drame au moment même où dans la savane africaine des braconniers subissent le sort qu’ils réservaient à un groupe de léopards.

Qui a ordonné leur mort plutôt que leur arrestation ? Pourquoi des éléments perturbateurs ont-ils mis le feu à un rassemblement pacifiste ? Qui sont les Félines ?

Shérazade de Miletune nous emmène à sa suite dans une enquête haletante où le mot NATURE s’écrit en majuscules.

 

Les Félines

(Je colle)

Vague ? Vague à l’âme qui lamine tout sur son passage.

Comment un seul coup de blues peut-il à ce point déterminer nos destins ?

Vous ne sortirez pas indemne de cette lame de fond décortiquant toutes les facettes de l’âme humaine - A lire de toute urgence !

 

Oublier la quatrième de couverture !

Un qui va se faire coller, c’est l’imprimeur. Je ne voudrais pas être à sa place…

En attendant, je boulotte, c’est toujours cela de gagné.

 

La dernière vague

(Je colle)

Peut-on éternellement fausser nos sentiments ? Avec finesse Shérazade de Miletune pose ses pions un à un et nous pousse dans nos derniers retranchements. Accepterons-nous de faire partie de sa multitude de personnages et d’entrer dans le roman ?

Ce récit-jeu est un pur délice de subtilité et d’ironie !

 

Mémoire d’un faussaire

(Je colle)

Ne manger que des aliments verts ou orange - Seules les céréales renferment les éléments de notre bien-être - Jeûner dix jours par mois est le summum du nirvâna - Consommez uniquement des repas liquides… Pourquoi certains ressentent-ils le besoin de suivre ces slogans dictateurs qui tentent de régir nos assiettes ?

Sous les dehors d’une enquête scientifique Shérazade nous plonge en réalité dans une folle histoire d’amour, celle de la cuisine et de ces délices.

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Catastrophe, Titi ! Tu as mélangé les quatrièmes de couverture ! C’est pas possible ! Shérazade de Miletune sera là dans un instant pour une séance de dédicace, je vais me faire virer.

 

Renaud n’en mène pas large et moi, je me fais tout petit, petit…

…petit coup d’œil à droite, petit coup d’œil à gauche, les lecteurs manipulent les livres, intrigués, puis les tendent à l’hôtesse. Quatre d’un coup ! Certains les prennent en photo et s’activent sur leur smartphone.

 

Titi, tu es trop top, tu as déclenché un buzz du tonnerre, ces bouquins seront des collector's, je te le promets !

 

Comblée, Shérazade de Miletune n’y a vu que la patte de génie de Renaud son agent.

Moi, j’ai repris le RER et je suis rentré chez ma mère. 

Demain, demain peut-être, aurai-je enfin un vrai boulot ?

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Pour Mil et une en mars 2017 - clic

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Publié le 28 Février 2017

Ce texte est une suite aux écrits suivants : clic - clic - clic 

Les textes de JACO  sont désormais réunis dans un livret.

Je vous invite à le parcourir ici : clic

C’est joli les coquillages !

Jaco les lave soigneusement, les sèche dans un grand drap en éponge puis les étale par ordre décroissant sur l’étagère de sa chambre. Ils lui rappellent son séjour à la mer avec les autres pensionnaires de "l’Arc en ciel"

Le matin, la plage était immense et, accompagnés des éducateurs, ils marchaient au bord de l’eau puis la marée montait, montait et la plage rétrécissait.

Jaco a apprécié jouer au ballon sur le sable fin et faire s’élever un cerf-volant dans le ciel. Comme il était fier de lutter contre le vent !

Un jour, le groupe s’était rendu dans un parc d’attraction et Jaco avait, pour la première fois de sa vie, fait un looping sur les montagnes russes. C’était un peu impressionnant mais ce n’est pas ce que Jaco avait le plus apprécié durant ses vacances.

 

Il faudra qu’il raconte tout cela à son frère Marcel quand il viendra lui rendre visite.

Comme d'habitude son frère dira peut-être "mais oui, Jaco, je connais tout cela"

Faut toujours qu’il joue au plus malin, Marcel !

 

De ses gros doigts boudinés Jaco caresse délicatement un coquillage et rigole en douce.

Marcel va être bien surpris et étonné d’apprendre que Jaco est devenu musicien.

Comment s’appelle l’instrument déjà ?

… heu, un orgue de limonade ? Un limon-air ? Un barba-rit.

Jaco a joué un air qu’il connaît bien, c’est donc un limon-air !

Après une dernière caresse il délaisse les coquillages pour ses crayons de couleur, décidé à faire un beau dessin pour Marcel.

 

...un vélo noir, IMMENSE, avec une remorque, puis un gentil monsieur avec une barbe blanche et un chapeau de paille, puis un théâtre installé sur la remorque, puis lui, Jaco, qui tourne la manivelle avec l’autorisation du monsieur, puis la musique qui s’envole du théâtre et, et… c’est difficile de dessiner la musique !

Les notes, c’est comment ? Comme des coquillages ?

Alors Jaco dessine quelques notes-coquillages s’échappant du limon-air.

 

Sûr, ce que Jaco a le plus apprécié pendant ses vacances ce n’est pas le grand huit mais les applaudissements des passants qui ont aimé sa musique.

Marcel sera épaté, c’est certain !

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Mil et une sujet semaine 33/2015 clic - image Mil et une

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Publié le 12 Février 2017

Mémé Kiki est vieille mais vi-ei-lle, comme… comme Matu Zalem, c’est Pépé DD qui me l’a dit et Pépé DD sait ce qu’il dit vu qu’il est vieux lui aussi encore plus vieux que Papy, son fils, le père de mon Papa.

Pas facile de s’y retrouver dans ma famille alors Maman a tracé une ligne perpendiculaire, enfin j'crois, avec des noms et des photos de bas en haut. Elle dit que c’est un arbre gynéa-logique. Pépé DD et Mémé Kiki ce sont les racines et moi, je me trouve à la cime.

Gare aux grands vents, a dit Pépé DD, si haut perché tu risques d’être secoué comme pendant une tempête en mer. Pépé DD, c’est un ancien matelot d’eau douce. Avec sa barque il n’a jamais navigué plus loin que le début de l’estuaire mais il veut me faire croire qu’il allait à la pêche aux requins. Je fais semblant de gober ses fables, histoire de respect pour sa qualité d’aïeul.

Mémé Kiki aussi je la respecte même si elle me fait marrer avec ses cheveux rouges qui rebiquent comme les piques d’un hérisson.

                  - Kiki, tu es superbe, vieille mais superbe, lance Pépé DD quand Papy la ramène de                       chez le coiffeur.

Papy fait la grimace et soupire, je crois qu’il a un peu honte des fantaisies de ses parents. Faut dire que Pépé DD est barbu et sa barbe tressée est à elle seule toute une histoire. En douce, j’ai parfois entendu des réflexions dans la famille. Certains prétendent que Mémé Kiki lui a imposé de ne jamais la couper, c’est comme un gage en repentir de l’avoir trompée jadis. D’autres affirment qu’elle cache une mystérieuse cicatrice, souvenir d’une rixe avec un rival.

J’ai dit à mon aïeul que je voudrais connaître son copain Matu Zalem, celui qui est aussi vieux que Mémé Kiki mais il a roulé de gros yeux signe qu’il est contrarié. Il est peut-être jaloux de ce Matu Zalem ? Est-ce lui son concurrent ?

Quand j’ai posé la question à Mémé Kiki, elle a souri de toutes ses rides et m’a dit : Ah ! L’amour, mon petit Arthur ! Il n’y a rien de tel !

J’espère le rencontrer un jour, ce fameux amour, et ajouter des branches à notre arbre gynéa-logique. Peut-être, plus tard, me transformerais-je à mon tour en racine… ?

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Pour Mil et une - semaine 23/2016

Logorallye sur une image originale de P. Levaillant - clic

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Publié le 8 Février 2017

…quarante huit heures de permission, pas une minute de plus sinon c’était la corvée balayage de la cour de la caserne. Le temps m’était compté et le rendez-vous que j’avais donné à Shirley mon seul point de mire. Daddy était venu me cueillir à la gare, Mumm avait repassé ma chemise rouge et mon jean. Adieu uniforme qui gratte, vive la liberté !

 

…j’allais enfin retrouver Bob. Que c’était long six semaines sans le voir et tant pis si Al, mon patron, me lançait des regards mécontents ; mon service au snack se terminait à dix-huit heures trente, pas question de prester une demi-seconde de plus. J’ai couru dans ma chambre en me débarrassant au plus vite de ma tenue de travail. Quelle robe allais-je enfiler ? Celle à volants que Bob aimant tant, ou la rouge ? Celle à fleurs ? J’ai fouillé fébrilement le tiroir pour trouver une paire de bas sans accroc.

- Shirley, ma fille, tu aurais pu préparer tout cela hier soir, m’a dit ma mère.

- Mmm, ai-je répondu la bouche remplie d’épingles à chignon.

 

- A table, a lancé Mum en passant la tête dans ma chambre.

- Pas faim, pas le temps !

Soupirs de Mum.

- T’as vu ta maigreur, heureusement que tu portes une ceinture à ton pantalon…

- Tracasse pas, Mum, je mangerai en ville.

Re-soupirs.

- On te verra d’ici ton départ ?

 

…où allait-il m’emmener ? Au ciné ? Chez le Chinois ? Au bal chez Billie ? Surprise !

- Tu me prêtes ta veste blanche ?

Kat, ma sœur, a râlé pour la forme quand j’ai ouvert sa garde-robe. Normal, je l’avais surprise avec mon pull jaune pas plus tard que la veille…

 

…ne pas oublier mon harmonica, mon foulard rouge… Shirley, ma belle, me voilà ! Zut une mèche rebelle ! Vite la gomina !

 

…qu’il est beau en uniforme sur la photo ! Mais c’est pas pratique pour aller danser… Dadidoudidadidouda… mes jambes frétillaient d’impatience.

Quand la sonnette a tinté, Kat s’est empressée d’aller ouvrir.

- Pas touche à mon Bob, j’ai crié.

- Pas de risque, a t-elle claironné.

 

Quand j’ai sonné à la porte de Shirley j’ai eu droit au regard hautain de sa sœur. L’était jalouse à coup sûr.

 

Nous avons dansé le rock et des slows toute la soirée. L’orchestre "The Kings" était au top. Les copains zieutaient Shirley, mignonne à croquer dans sa robe à volants…

…Bob n’a pas résisté à monter sur scène et à accompagner "The Kings" avec son harmonica. Toutes les filles m’enviaient ! …

…L’histoire s’est corsée quand nous avons décidé de rentrer. Dehors, c’était le déluge. Nous avons couru dans les rues, trempés jusqu’aux os….

…Je tremblais de froid alors Bob m’a guidée vers le kiosque du parc. Bien serrés l’un contre l’autre, nous avons attendu la fin de l’averse et…

…Et ce qui devait arriver arriva… tout comme ta mère neuf mois plus tard !

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- Alors Granny, toi aussi tu as été une "maman surprise" à vingt ans ? Et toi Grandpa un jeune papa encore soldat ?

Granny a souri et a répondu - je serai heureuse de garder de temps en temps ton petit bout de chou.

Grandpa, lui, a sorti de sa poche son harmonica. Quand il est ému et que les mots s’emmêlent dans sa tête, les notes sont toujours ses alliées.

Norman, mon amour, m’a fait un clin d’œil et dans son berceau, Emily a soupiré d’aise…

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Pour Mil et une en mars 2013  -  peinture de Norman Rockwell

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Publié le 27 Janvier 2015

Concerne : déclaration sinistre-incendie

Madame la Marquise,

un fâcheux incident dû au zèle d’un employé occupé à la déchiqueteuse à papier a fait disparaître la déclaration de sinistre-incendie que vous aviez adressée à notre compagnie d’assurances et nous en sommes sincèrement désolés.

Auriez-vous l’obligeance de nous fournir une copie de ce document ?

Dans cette attente, je vous prie de croire, Madame la Marquise, à l'expression de nos sentiments distingués.


M. Alâdrois

Assurances Toutrisque

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Concerne : déclaration sinistre-incendie

Monsieur Maladroit,

dans le désarroi qui fut mien j’ai égaré la copie de ma déclaration de sinistre aussi vais-je tenter de la réitérer succinctement de mémoire.

    • Tout cela est dû à l’impétuosité de Max le chien de feu mon époux. Cet animal n’a jamais supporté la délicatesse de Mimine, ma chère chatte persane et quand celle-ci après sa sieste a voulu me rejoindre au jardin où, accompagnée de Firmin, notre jardinier, je cueillais des roses, il l’a poursuivie comme un malotru.

    • Mimine, apeurée, a tenté avec courage de semer son tortionnaire. Imaginez, Monsieur Maladroit, quelle fût sa terreur quand elle se faufila entre les artificiers s’activant à la préparation du son et lumière devant avoir lieu le soir même.

    • Il faut savoir en effet que malgré l’accident malencontreux et fatal dont fut victime mon époux au cours de la dernière saison de chasse je tenais à poursuivre la tradition annuelle d’ouvrir nos parc et jardins aux braves gens des alentours et à leur offrir un feu d’artifice…

    • Max, Monsieur Maladroit, est un chien imposant. Il bouscula un artificier qui s’apprêtait à faire un essai. Déséquilibré, le brave homme laissa s’échapper la mèche allumée qui chuta sur les explosifs. Il s’ensuivit des tirs impromptus qui nous surprirent Firmin et moi au point de nous faire accourir vers le château en abandonnant les gerbes de fleurs prévues pour agrémenter le décor.

    • Une fenêtre de mansarde était restée ouverte, celle où étaient entreposés des pagnes, vestiges de la collection africaine d’un aïeul de mon mari. Hélas, une étincelle en profita pour propager le feu à la paille de mil très sèche et de là à toute la bâtisse.

     • Les pompiers alertés connurent des ennuis de véhicule. Songez, Monsieur Maladroit, à ce qu’il advient de perdre la calandre et de crever deux pneus dans ces circonstances… Quand enfin ils sont parvenus au château l’incendie était impressionnant.

    • Hélas, trois fois hélas, la pression de la conduite d’eau n’étant pas suffisante sur notre colline les soldats du feu se virent contraints de puiser l’eau dans le grand bassin. Pour l’anecdote, le chauffeur en manœuvrant décapita la statue ancestrale qui le borde mais comme me l'a dit le capitaine, il y a toujours des dégâts collatéraux.

    • Notre splendide bassin fut vidé, les carpes en manque d’oxygène se débattirent en vain mais le sinistre put enfin être circonscrit.

    • Comme vous pourrez le constater au travers des deux photos que je joins à ce courrier ma demeure est désormais inhabitable et le domaine tout entier présente un aspect pitoyable et dévasté évoquant de sinistres souvenirs de guerre.

    • Mon seul bonheur est d’avoir retrouvé Mimine, ma douce chatte, saine et sauve et d’être hébergée chez Firmin, mon fidèle jardinier. C’est avec beaucoup d’impatience que j’espère de vos nouvelles pour enfin envisager l’avenir.

Bien à vous,

 

Cunégonde de la Déveine,

Marquise de la Guigne

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Publié le 25 Novembre 2014

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Les textes de JACO  sont désormais réunis dans un livret.

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Les grandes personnes, c’est très compliqué, Jaco le sait bien !

La preuve, tout à l’heure, pendant l’excursion dans le parc, l’Marcel, son frère s’est exclamé : il est superbe cet elfe en fil de fer ! Il fait s’envoler le savoir aux quatre vents !

Un elfe !

Le savoir !

L’Marcel, il joue toujours au plus malin mais il ne sait même pas que les elfes ont des oreilles pointues et que ce sont les anges qui ont des ailes ! Et puis les semences, c’est pas du savoir, Jaco en est certain.

Les grandes personnes sont décidemment bizarres. Quatre vents ? Quatre !

Jaco en connait bien plus de quatre. Sur ces gros doigts boudinés il compte : un, la bise, deux, le vent du nord, trrrrois, heu, trois… Bof ! Tantôt il s’en rappellera…

Ce dont il se souvient bien, Jaco, c’est de sa vie à la ferme, avant le décès du père. Il appréciait tellement de gambader dans les prés, cueillir des cardamines, des primevères et même des pissenlits et puis, il faisait comme l’ange quand les fleurs se transformaient en aigrettes, il soufflait, soufflait en faisant un vœu.

Jaco aime bien les vœux. Depuis qu’il réside à l'"Arc-en-ciel" il en fait souvent pour que l’Marcel qui vit à la ville vienne le voir, ou pour qu’il y ait du potage aux tomates au menu, ou pour ne plus jamais faire pipi au lit ou… la liste est longue !

- Dis-moi, Marcel, tu crois qu’il pousse des pissenlits au paradis et que les anges font pipi au lit ?

L’Marcel a toujours un air ahuri quand Jaco lui pose une question. Vraiment les grandes personnes sont étranges.

Jaco, en secret, renouvelle son vœu de ne jamais être comme eux, il préfère tellement être lui, même si on le dit un peu différent !

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Publié le 6 Novembre 2014

   

- Le père François ! Vite, sauvons-nous !

Totor, moi et Lulu, on rigole bien en observant le père François au travers de la haute haie d’aubépine.

- Je vous ai à l’œil garnements, gare à vous !

Lulu, le plus gourmand et le plus prévoyant de nous trois brandit, triomphant, son sac rempli de prunes. Notre réserve de guerre comme il dit.

Totor a été piqué par une guêpe et suce son doigt douloureux.

Moi, je prépare déjà un plan de représailles dans ma tête.

 

On s’est séparés en fin d’après-midi après avoir caché notre trésor dans notre camp secret, il était temps de rentrer.

- Tu ne manges pas grand chose, a dit Maman en observant mon assiette. Les gargouillis de mon ventre ont répondu pour moi et Maman a levé un sourcil inquisiteur.

Au dessert, elle a dit - je suis passée à l’épicerie tout à l’heure. L’épicier qui rentrait de son verger sur la colline était furieux, son prunier est la proie de maraudeurs.

Papa m’a jeté un regard sévère mais moi, j’ai continué innocemment à déguster ma portion de far, une des spécialités de Maman. Je ne me suis pas fait prier pour aider à la corvée vaisselle mais ma mère est fine mouche et a à nouveau sourcillé quand j’ai dit - je vais retrouver Lulu et Totor pour une partie de foot.

- Ne rentre pas trop tard, a dit Papa, je n’aime pas que tu traînes en rue quand il fait nuit.

 

Totor, c’est lui le spécialiste en dessin et malgré son doigt douloureux il a réalisé avec des craies de couleur un grand œil super, un qui semble jeter des flammes.

Demain matin, tout le village pourra l’admirer sur la porte blanche de l’épicerie.

 

- J’ai mal au ventre, a gémi Lulu.

- Moi aussi, a répondu Totor.

Moi, je n’ai pas eu le temps de dire quoi que ce soit, je suis disparu derrière une haie. Dans le noir, il m’a semblé qu’un œil moqueur m’observait.

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