Publié le 27 Octobre 2018

 

Oli-B - clic et clic

« Non, nous n’avons pas de place pour emporter tes pots de gouache  et tes pinceaux » a marmonné Maman en fermant la porte puis elle s’est tournée vers moi en me tendant la clé.

« Je te la confie » a-t-elle simplement dit.

Depuis, je la garde précieusement au fond de la poche droite de mon pantalon.

C’était quand déjà ? Pas hier, ni le jour avant, ni encore…. je n’en sais plus rien mais, bof, ça n’a pas d’importance la petite maison est tellement loin à présent, j’en arrive même à me demander si elle existe vraiment.

Je suis entouré de mille couleurs et j’adore les couleurs. Elles sont toutes en mouvement autour de moi.

Moi, je les suis et je pense que moi aussi je suis une petite tache colorée et remuante.

Quand j’étais un petit môme de cinq ans, Maman me disait souvent « cesse de bouger tout le temps, tu me donnes le tournis »

Je ne savais pas ce que c’était le tournis…

J’ai presque dix ans à présent et Maman m’encourage à marcher. « Ne me perds pas de vue » me serine-t-elle sans cesse.

Et le tournis, maintenant, je connais !

Parfois, quand la faim fait trop chanter mon ventre, que les muscles de mes jambes sont épuisés et que je ne marche plus droit, je vois une larme qui roule lentement sur la joue de Maman. Alors, je me redresse, j’avale ma salive, c’est déjà ça… et pense bien fort à mes pots de gouache. Grâce à eux, je me fais couleur vive jusqu’au centre de moi-même pour avoir un peu plus chaud et je serre bien fort la clé au fond de ma poche.

J’aimerais deviner si elle ouvrira une porte, là-bas.

Où ? Quand ?

Je ne sais pas !

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